17.10.06

Chapardage malheureux

Le sombre révélateur tyrannique m’a mise dans un bel embarras. J’espérais m’éclipser discrètement en même temps que les autres invités, sans déclencher le moindre esclandre, mais il n’a pu retenir sa verve insolente.
Quand il a claironné « Pourquoi ne prends-tu pas aussi les cuillères à dessert ? Elles sont plus jolies que les fourchettes ! », j’ai senti mon ignorance se révulser, mon sang bouillonner et il m’est apparu clairement que les portes de la fastueuse demeure des Laville me seraient fermées à jamais. Ma célèbre magnificence sauvage était bien mal en point. Le maître de maison, bien connu pour sa pruderie byzantine ne laisserait pas passer cette opportunité inespérée de me radier de sa liste de convives.
Une calme méchanceté s’empara de moi, dont la douceur chatoyante était pourtant réputée, un désir incoercible de revanche me submergea et des images d’une sauvagerie impensable m’apparurent. Notre fameux radoteur pinailleur n’avait pas fini de regretter ses paroles. En l’espace d’une soirée, ce salmigondis dévergondé avait bien assombri mon brillant avenir, mais je n’avais pas dit mon dernier mot.

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