Je me souviens de la détestable robe rouge et des chaussures vernies blanches que mes parents me forçaient à porter pour les grandes occasions familiales.
Je me souviens du blouson en cuir à l’odeur animale, tiède, si lourd qu’il me rendait invincible, comme si je portais une armure.
Je me souviens de la magnifique montre bleue reçue à Noël de la part de mon amie à qui j’ai simultanément offert la même par hasard.
Je me souviens des chaussures en cuir vert, énormes et très confortables, qui attiraient tous les regards.
Je me souviens du grand imperméable noir informe acheté aux Puces de Saint-Ouen et qui me donnait une allure sinistre dont je raffolais.
Je me souviens du tailleur gris sage acheté pour passer des entretiens d’embauche et que je n’ai plus jamais porté par la suite.
Je me souviens de la gourmette en argent gravée à mon prénom offerte par mon parrain décédé depuis et que j’ai fièrement arborée jusqu’à ce qu’elle se brise.
Je me souviens des gants en cuir marron de ma mère qu’elle m’a donnés, cadeau luxueux symbolisant mon entrée dans le monde des adultes.
Je me souviens de la collection de vestes farfelues aux couleurs impensables achetées sur des coups de tête et rarement portées.
Je me souviens du pull tricoté par ma mère, noir et gris, si épais qu’il occupe un rayon entier de ma commode et qu’il m’est impossible de mettre un blouson par-dessus.
Je me souviens de ma première paire de lunettes, une monture ronde en plastique, véritable punition pour l’enfant pétulante de six ans que j’étais.