24.7.05

Graffiteurs radieux

Aussitôt que la nuit enveloppe la ville,
Les graffiteurs armés de bombes de couleur
Conjuguent leurs talents pour couvrir la froideur
Du décor bétonné de leurs dessins habiles.

Sous l’œil indifférent de la lune immobile,
Les maîtres du pochoir tracent avec ardeur
Sur les murs délabrés des motifs en l’honneur
D’un horizon pétri de promesses fertiles.

Parés de leur vision d’un flamboyant ailleurs,
Ils arpentent les rues pour composer en chœur
Des tableaux constellés de messages fébriles.

Les princes du graphisme effacent la laideur
D’un monde de grisaille, où la mort se profile,
Sous leurs fresques fleuries de joies indélébiles.

Boxeur vaincu

Le boxeur chevronné lance à son adversaire
Une volée de coups, qu’attise sa colère
De champion qui défend une médaille d’or
Arrachée à la poisse après cinq ans d’efforts.
Au mépris des douleurs qui lui vrillent la tête,
Il lâche un chapelet de directs sur l’athlète
Qui décoche en retour un crochet ravageur,
Si bien que s’amplifient les cris des spectateurs.
Sonné au dernier round, le crack déchu s’écroule
Tandis que des bravos jaillissent de la foule.

La belle et le chat

Entre l’animal et la belle
Habillée d’un voile lacté,
Se tisse une complicité
Nourrie de caresses fidèles.

Dès qu’elle effleure le pelage
Du chat à l’envoûtant regard,
Il frissonne de toute part,
Avant de lécher son visage.

Au rythme des attentions tendres
De la princesse et du félin,
Se trame un bonheur sibyllin
Dont ils explorent les méandres.

Leurs égards dressent en silence
Le palais de leur connivence.

23.7.05

Fleuris ton quotidien

Fleuris ton quotidien de bouquets enchanteurs,
Cueillis dans le jardin de la nuit, où tu cesses
D’exercer un travail dont la rigueur t’oppresse,
Pour offrir à ta belle un moment de bonheur.

Enflamme ton esprit d’insatiable lecteur
En découvrant des vers pétris d’une tendresse
Habile à engloutir les regrets qui te blessent
Au fond d’un océan de plaisir rédempteur.

Conduis tes insomnies vers le port d’une ivresse
Zélée à déliter l’écho de tes faiblesses,
À l’orée d’un matin aux présages rieurs.

Lance des chapelets de sonnets à l’adresse
De l’ami qui revient illuminer ton cœur
De ses rêves germés dans un lointain ailleurs.

Ondes de bonheur

Dans l’antre d’une nuit constellée d’auditeurs
Dont la vie monotone attise les rancœurs,
L’animateur armé de sa gaieté s’applique
À mêler sans répit discussions et musique
En un cocktail pétri de son habileté
À refleurir d’espoir les cœurs désenchantés.
Sur les esprits rongés de solitude, il tisse
Un berceau de douceur, pour qu’à l’aurore, ils glissent
Dans un puits de sommeil qu’accompagne le son
Du poste qui diffuse un bouquet de chansons.

Entre les baisers et les pleurs

Entre les baisers et les pleurs
Nourris de reproches stupides,
Le fil de la joie se dévide
En un écheveau de rancœurs.

Malgré les regards enjôleurs,
La tendresse se dilapide
Entre les baisers et les pleurs
Nourris de reproches stupides.

Après les frissons de bonheur
Assortis de serments limpides,
L’esprit morose tourne à vide,
Tandis que la passion se meurt
Entre les baisers et les pleurs.

22.7.05

Prince du pochoir

Le graffiteur armé de ses bombes promène
Son regard sur le mur qu’il s’apprête à doter
D’un motif constellé de mots ensanglantés,
Nés de ses obsessions à la violence obscène.

Au gré de son talent, il transforme ses peines
En tableaux insolents dont l’étrange beauté
Inspire aux promeneurs l’envie de visiter
Son univers d’artiste aux couleurs souveraines.

De boulevard cossu en faubourg dévasté,
Le prince du pochoir émaille la cité
De fresques imprégnées d’une rage certaine.

Guidé par les élans de son cœur indompté,
Il brosse un univers dont la ruine prochaine
Hante les inscriptions qu’il trace par centaines.

Camping de l’ennui

Dans un camping miteux au bord de nulle part,
Le parisien chagrin adoucit de pinard
Le dégoût qui l’étreint devant ce paysage
Qu’une pluie continue transforme en marécage,
Pendant que sa souris s’active à préparer
Une tambouille inapte à le revigorer.
Le gamin rondouillard s’empiffre de tartines
Sous l’œil indifférent de sa sœur qui fulmine
Contre l’entêtement de sa mère à venir
Chaque été dans ce coin ennuyeux à mourir.

Dans le jardin de la tendresse

Dans le jardin de la tendresse
Fleuri de désirs embrasés,
Poussent des gerbes de baisers,
Qu’un vent de volupté caresse.

L’amoureux mène sa princesse,
Pour un voyage improvisé,
Dans le jardin de la tendresse
Fleuri de désirs embrasés.

Sitôt que son ardeur le presse
De cueillir les fruits proposés
À ses lèvres, l’homme avisé
Conduit au plaisir sa maîtresse,
Dans le jardin de la tendresse.

21.7.05

Harmonie poétique

Au terme d’une année de luttes incessantes,
Tramées par un bouffon, médiocre gribouilleur,
Au verbiage pesant d’une amère rancœur,
Les poètes déjouent la haine grandissante.

Unis pour conjurer les attaques cinglantes
Du pantin assisté de ténébreux lecteurs,
Ils forment des bouquets de sonnets en l’honneur
D’une gaieté propice à leur verve insolente.

Ils oublient leurs conflits pour ciseler en chœur
Des diamants assemblés en poèmes rieurs
Que raille le guignol à la plume indécente.

Ils composent ensemble à l’encre du bonheur
Un ouvrage fleuri d’une joie qui supplante
La cruelle ironie du roi de la tourmente.

Bouquet de baisers

De marché citadin en fête de village,
Le séducteur armé de son humour engage
Les filles à cueillir un bouquet de baisers
Au jardin du désir, où les corps embrasés
Chantent leur volupté en accords de tendresse.
D’un regard constellé de brûlantes promesses,
Il convie les beautés à laisser leur pudeur,
Pour courir à son bras au pays du bonheur,
Où, mû par son ardeur de libertin, il tisse
Sur leur peau enfiévrée un voile de délices.

Cycliste radieux

Sitôt qu’il quitte son boulot
D’agent d’une antenne postale,
Le passionné de la pédale
Enfourche son précieux vélo.

Il se faufile dans un flot
D’autos à l’odeur infernale,
Sitôt qu’il quitte son boulot
D’agent d’une antenne postale.

Insensible au confort falot
Dans lequel ses amis s’installent,
Il s’enfuit de la capitale
Pour une balade en solo,
Sitôt qu’il quitte son boulot.

20.7.05

Internaute novice

Le gazier, épuisé d’affronter sa gonzesse
Qui s’acharne à souiller de sa mauvaise humeur
Leur unisson fleuri de frissons enchanteurs,
Se décide un matin à calter en vitesse.

Au lieu de s’abîmer dans un puits de tristesse,
Le type, encouragé par un copain noceur,
Commence à pianoter sur son ordinateur
Des annonces pétries de lascives promesses.

Dans sa nuit solitaire, il tape avec ardeur
Des chapelets de mots, qui conduisent son cœur
Au rivage brûlant d’une indicible ivresse.

L’internaute novice immerge sa rancœur
Dans le fougueux torrent de plaisir, que ne cessent
De nourrir les photos d’aguichantes princesses.

Poule sombre

Une poule, lassée de donner chaque jour
L’œuf qu’elle se fatigue à pondre avec amour
Au fermier insolent qui nourrit sa marmaille
En mettant en bouillie le fruit de ses entrailles,
Caquette amèrement sous le regard moqueur
Du coq enorgueilli de son art de chanteur.
Plutôt que son enfant finisse en omelette,
Elle l’ensevelit au fond d’une cachette,
D’où un gosse, attiré par ses agissements,
L’ôte pour le gober avec un bruit dément.

Poule chagrine

Enfermée parmi ses consœurs
Dans un poulailler minuscule,
Une pondeuse dissimule
Le chagrin qui lui noue le cœur.

Elle caquette avec ardeur
De l’aube jusqu’au crépuscule,
Enfermée parmi ses consœurs
Dans un poulailler minuscule.

Quand la nuit mêle sa noirceur
À la tristesse qui la brûle,
Secrètement, elle bascule,
Dans un désespoir ravageur,
Enfermée parmi ses consœurs.

19.7.05

Bar agité

Accoudé au comptoir, un vigoureux soiffard
Débite à l’assemblée des histoires marrantes,
Sous l’œil indifférent du patron que tourmente
Le départ de sa femme avec un salopard.

Dans un coin de la salle, un frimeur en costard
Essaie d’embobiner une inconnue craquante
Qui rêvasse au-dessus de son diabolo menthe,
Au lieu de succomber à son laïus ringard.

Un merlan agonit de railleries cinglantes
Une pute camée qui, de rage, le plante
Pour s’envoler au bras d’un séduisant loubard.

À l’heure de fermer, la serveuse serpente
Jusqu’à la table où pinte un silencieux gaillard
Qui lui règle son compte en deux coups de poignard.

Cycliste acharné

L’œil rivé à la roue d’un copain d’écurie
Occupé à grimper la côte avec furie,
Le coureur acharné s’exhorte à pédaler
Au sein du peloton dont le rythme endiablé
Déchaîne les bravos de la foule joyeuse.
Sous le soleil de plomb, le cycliste en danseuse
Étouffe les douleurs qui lui vrillent le corps,
Pour filer ardemment vers la médaille d’or,
Trophée accompagné d’une coquette prime
Dont la pensée lui donne une énergie sublime.

Lapins rebelles

Afin de s’enfuir du clapier
Où la tristesse les grignote,
Deux lapins rebelles complotent
Un plan dans le dos du fermier.

Avec un soin particulier,
Ils mettent le sol en compote,
Afin de s’enfuir du clapier
Où la tristesse les grignote.

Après un déjeuner princier,
Composé de jeunes carottes
Dont la fraîcheur les ravigote,
Ils creusent un tunnel grossier,
Afin de s’enfuir du clapier.

18.7.05

Flânerie urbaine

D’esplanade animée en boulevard tranquille,
Le marcheur solitaire explore la cité
Où le soleil couchant insuffle sa gaieté
Au ballet incessant des donzelles graciles.

Voyageur sans bagage, il visite la ville
Au hasard des quartiers dont les murs graffités
De slogans en l’honneur d’une âpre liberté
Ravivent en son cœur une émotion fébrile.

Cependant que la nuit s’empresse d’emporter
Les hommes vers leur nid de tendres voluptés,
Il arpente les rues sous la lune immobile.

Dans le jardin fleuri d’un tandem de vigiles,
Il poursuit son errance, avant de s’arrêter
Sur un banc où l’accueille un clochard édenté.

Abandon sinistre

Dans la froideur du soir, l’œil rivé à la porte
Fermée sur ses regrets, le citadin exhorte
Les anges ténébreux du néant à venir
Mettre un terme à sa vie dépourvue de plaisir.
Dans son appartement étouffant de silence,
Il sent le submerger le flot d’une démence
Nourrie de l’abandon qui lui ronge le cœur.
Le tic tac du réveil accuse la lenteur
Du temps qui le meurtrit depuis que sa princesse
A quitté sans un mot le nid de leur tendresse.

Regrets ténébreux

Dans les débris de la confiance,
Le cœur s’écorche
Aux arêtes du chagrin.

L’amertume délite
Les souvenirs brûlants
D’un unisson voluptueux.

Le silence étouffe
L’ombre d’un espoir
Dans un linceul de lassitude.

Le temps déroule
Son ruban insipide
Dans l’insomnie solitaire.

Entre un passé dévasté
Et un futur obscur,
Le quotidien s’effrite.

Dans la froideur du lit,
Le corps pèse
D’un abandon inadmissible.

Lourde de trahisons,
L’âme s’abîme
Dans une tristesse muette.

À l’angle de la joie,
La vie se dilapide
En regrets ténébreux.

17.7.05

Voluptés volages

Au bout de quinze années d’harmonie sans nuages
Avec sa dulcinée dont la lascive ardeur
Le conduit chaque jour au sommet du bonheur,
Le citadin s’éprend d’une beauté sauvage.

La bourgeoise, ulcérée par le libertinage
De son homme envolé pour un radieux ailleurs,
Apaise son chagrin dans les bras d’un charmeur
Habile à l’entraîner vers de fiévreux rivages.

Au lieu de s’abîmer dans un puits de douleur,
Elle palpite au gré des baisers enchanteurs
Que sème sur son corps son amant de passage.

Un plaisir flamboyant efface sa rancœur,
De sorte que, comblée, la donzelle envisage
Un avenir pétri de voluptés volages.

Foi chancelante

Dans l’église bondée de croyants immobiles,
En train de méditer un verset d’Évangile,
Le curé, que torture un chagrin grandissant,
S’obstine à célébrer le Christ, alors qu’il sent
L’abandonner sa foi en la vie éternelle.
Cependant qu’il invite un groupe de fidèles
À chanter un cantique avec l’enfant de chœur
Afin de glorifier la divine splendeur,
Une gerbe d’éclairs enflamme le visage
Du Seigneur qui s’effondre avec un cri de rage.

Ennui préfabriqué

De retard en reproche,
La passion se délite
En éclats de silence,
Où le rire s’étouffe.

Sur le miroir du temps,
S’estompe le projet
D’un unisson rebelle
Aux griffes du soupçon.

Le flambeau de nos joies
S’éteint dans l’océan
De nos rêves blessés
Par la monotonie.

À l’horizon se forme
Une armée de nuages
Pressée de submerger
Nos souvenirs crédules.

La main de l’amertume
Dénoue nos existences
Au seuil d’un avenir
D’ennui préfabriqué.

16.7.05

Vacances mortelles

Après un an de taf à un rythme d’enfer
Au guichet d’une banque infestée de rapaces,
La souris en congé troque son tailleur classe
Contre un jean assorti d’un T-shirt outremer.

La nana survoltée prépare en un éclair
Sa valise, sous l’œil de son jules qu’agace
Sa gaieté insolente, alors qu’elle se casse
Pour quinze jours sans lui en bordure de mer.

Sur la route du sud, la donzelle rêvasse
De vacanciers férus de voluptés fugaces,
Si bien que des frissons lui titillent la chair.

La gonzesse conduit sa tire avec audace,
Jusqu’à ce qu’un camion la heurtant de travers
L’envoie se fracasser contre un pylône en fer.

Renard affamé

Posté près de la niche où dort un labrador,
Un renard affamé sanglote sur son sort
D’animal condamné, pour gagner sa pitance,
À couvrir chaque nuit un territoire immense,
Cependant que le chien, vautré dans son abri,
Attend paisiblement l’homme qui le nourrit.
Aussitôt que le maître apporte une gamelle
Qu’accueille en gémissant son compagnon fidèle,
Le carnivore, fou de jalousie, reprend
Sa quête forcenée de gibier odorant.

Entre la lame et le poison

Entre la lame et le poison
À la pestilence explicite,
L’homme désespéré hésite,
Ballotté par sa déraison.

Las de ses échecs à foison,
Il s’exhorte à décider vite
Entre la lame et le poison
À la pestilence explicite.

Lorsque surgit à l’horizon
Un rayon d’espoir insolite,
Son envie de mourir s’effrite,
Si bien que point sa guérison
Entre la lame et le poison.

15.7.05

Princesse magnifique

Quand ma belle, éveillée par les tièdes lueurs
D’un soleil habillé de radieuses promesses,
Cueille sur mon visage un bouquet de tendresse,
Présage délicat de frissons enchanteurs ;

Quand son regard empreint d’une lascive ardeur
M’encourage à combler de fougueuses caresses
Son magnifique corps que je mène à l’ivresse
Au fil de mes baisers imprégnés de douceur ;

Quand mes mains avisées conduisent ma princesse
Au port des voluptés, où ma bouche s’empresse
De boire le nectar jailli de son bonheur ;

L’esprit débarrassé de ma sombre tristesse,
Je serre sur mon sein la reine de mon cœur,
Au seuil d’une journée qu’enflamme sa splendeur.

Dimanche ordinaire

Le temps pose un linceul d’ennui sur un dimanche
Inapte à divertir l’homme qui se retranche
Dans une songerie où s’éteignent les pleurs
De l’enfant assailli d’une étrange frayeur.
Pendue à la fenêtre, une lune timide
Essaime ses lueurs sur les assiettes vides,
Tandis que le tic tac de l’horloge conduit
Le ballet ténébreux des pensées jusqu’au puits
D’un sommeil constellé de rêves que supplante
La laideur d’un matin à la fièvre oppressante.

Infatigable aventurier

Avec son cahier à spirale
Couvert de dessins coloriés,
L’infatigable aventurier
Construit son bonheur sans escale.

Dans les rues d’une capitale,
Il escorte des écoliers,
Avec son cahier à spirale
Couvert de dessins coloriés.

Accompagné par des cigales,
Il arpente un chemin côtier,
Avant de partir en voilier
Pour une balade estivale,
Avec son cahier à spirale.

14.7.05

Tourteau amer

Le tourteau, étendu sur un lit de glaçons,
Regarde le vendeur emballer des poissons,
En tremblant de frayeur lorsque sa main s’avance
Vers le casier puant où il souffre en silence.
Entouré d’un amas de compères mourants,
Il bénit le patron qui vante les harengs
Au client qui réclame une fraîcheur parfaite,
Avant de s’affoler quand un regard s’arrête
Sur son corps rebondi de crabe condamné
À composer l’entrée d’un repas raffiné.

Mouton rebelle

Dans la paisible bergerie
D’où s’exhalent d’âcres odeurs,
Le mouton vêtu de blancheur
Regrette la tendre prairie.

Loin de la nature fleurie,
Il sent l’ennui ronger son cœur
Dans la paisible bergerie
D’où s’exhalent d’âcres odeurs.

Debout dans la paille pourrie
Dont l’effroyable puanteur
Attise sa mauvaise humeur,
Il trame une mutinerie
Dans la paisible bergerie.

Errance urbaine

Au terme d’un conflit affligeant de violence,
La femme exaspérée plante son mec braillard,
Avant de vadrouiller au gré des boulevards
Dont la calme noirceur étouffe sa prudence.

Dans la ville endormie, elle marche en silence,
Lorsqu’un individu surgi de nulle part
L’agrippe en lui collant sous le pif un poignard,
Si bien qu’elle lui tend son sac sans résistance.

La nana dépouillée promène son cafard
Jusqu’à l’aube où, fourbue, elle entre dans un bar
Bourdonnant de fêtards sourds à ses doléances.

La donzelle sourit quand un type en costard
L’invite, d’une voix pétrie de bienveillance,
À trinquer au matin rayonnant d’espérance.

13.7.05

Vacances prometteuses

La donzelle, partie pour un mois enchanteur
Loin de son bouge noir d’une puante crasse,
Se rue vers sa bagnole où, fébrile, elle entasse
Des fringues assorties à son style aguicheur.

La solitaire appuie sur l’accélérateur
De son bruyant tacot dont la lenteur l’agace,
Pendant qu’elle agonit le mec qui la dépasse
De jurons qu’il déjoue d’un méchant bras d’honneur.

Quand un clébard jailli d’un chemin se fracasse
Contre son pare-chocs, la gonzesse se casse
Sous le regard du maître effondré de douleur.

Rebelle à la beauté du paysage où passe
Sa caisse dont l’ennuient les sursauts du moteur,
La citadine file au pays du bonheur.

Vache chagrine

Une vache, lassée de sa vie ennuyeuse,
Beugle quand le fermier apporte la trayeuse.
La laitière cloîtrée jalouse les canards
Qui, du matin au soir, courent de toute part,
Tandis qu’elle moisit dans l’étable puante
Où le mugissement de ses sœurs la tourmente.
Elle envie les poulets qui s’ébattent dehors
Sous un soleil habile à réchauffer leur corps,
Cependant qu’enfermée dans sa prison obscure,
Elle mange du foin en rêvant de pâture.

Étendue près de son amant

Étendue près de son amant
Dont le silence l’empoisonne,
La belle en nuisette bougonne,
Les yeux rivés sur son roman.

Elle gémit amèrement
Sur ses insomnies monotones,
Étendue près de son amant
Dont le silence l’empoisonne.

La donzelle, au bout d’un moment,
Lassée de veiller, abandonne
Son livre près du téléphone,
Pour fuir dans un rêve charmant,
Étendue près de son amant.

12.7.05

Prière sensuelle

Dans mes nuits d’insomnie, viens dessiner, princesse,
Un chemin émaillé d’exquises voluptés,
Afin de consoler mon esprit infesté
D’atroces obsessions dont la vigueur m’oppresse.

Dépose à mon chevet un bouquet de tendresse
Habile à repousser les démons entêtés
À danser dans mon cœur un ballet agité,
Avant de m’enflammer au fil de tes caresses.

Immerge les regrets zélés à me hanter
Au fond d’un océan de frissons indomptés,
Artisans passionnés d’une subtile ivresse.

Couvre-moi de baisers prompts à réconforter
Mon âme que tourmente une amère tristesse,
De sorte que je boive au puits de tes promesses.

Gribouilleur perfide

Pressé de retrouver son amante infidèle,
Envolée sans un mot, le gribouilleur harcèle
Les mordus d’Internet de ses laïus geignards,
Afin de les mêler à ses tours revanchards.
Il livre à l’assemblée ses peines de ménage
En priant que, touchés par ses vibrantes pages,
Des inconnus naïfs acceptent de l’aider
Dans ses machinations de vengeur obsédé.
Les lecteurs qu’il essaie de gagner à sa cause
Déjouent sa perfidie en ignorant sa prose.

Poison punie

Afin de punir la poison
Qui le raille avec insolence,
Le malotru furieux se lance
À sa chasse dans la maison.

Excédé par ses trahisons,
Il s’abandonne à la violence,
Afin de punir la poison
Qui le raille avec insolence.

Grisé par l’alcool à foison
Qu’il boit pour noyer ses souffrances,
Le type exaspéré s’avance
En hurlant avec un tison,
Afin de punir la poison.

11.7.05

Kermesse animée

Pendant que le gamin dilapide en vitesse
Le paquet de pognon allongé par sa sœur
Pour qu’il taise le nom de l’élu de son cœur,
Le père en loucedé reluque les gonzesses.

La daronne, accostée par un raseur, s’empresse
D’aller se réfugier près de l’instituteur
Occupé à jacter avec le directeur
Qui dévore un beignet dégoulinant de graisse.

L’alcool dont il abuse engloutit la pudeur
Du maître qui, paré d’un regard enjôleur,
Propose à la souris de quitter la kermesse.

Le couple improvisé de libertins délaisse
La fête constellée de garnements rieurs,
Afin de s’échapper vers un furtif bonheur.

Poète voluptueux

Loin de la frénésie de ses contemporains
Occupés à bâtir un avenir empreint
D’un savoir parfumé d’une aigre suffisance,
Le poète compose au fil de ses errances
Des versets qu’il dédie aux accortes beautés
Qui constellent ses nuits d’ardentes voluptés.
Il cisèle des vers en l’honneur des princesses
Qui mènent son désir au port de leur tendresse.
Il flâne dans les rues dès que tombe le soir,
Pour offrir au public ses mots pétris d’espoir.

Pintade grillée aux rondelles de petits oignons

Devant son écran foudroyé
Par un violent coup de tonnerre,
La pintade ivre de colère
Se répand en cris éraillés.

Ses cinglants jurons de vipère
Meurent dans son triste foyer,
Devant son écran foudroyé
Par un violent coup de tonnerre.

Seule avec sa rage, elle espère
Trouver un moyen d’envoyer
Son fiel sur le Net émaillé
D’ennemis qu’elle vitupère,
Devant son écran foudroyé.

10.7.05

Rencontre salutaire

Dès que la nuit revêt les rues de la cité
D’une froideur habile à souligner l’absence
De sa belle abîmée au fond de la démence,
L’homme quitte sa chambre à pas précipités.

Il flâne dans le parc lourd d’une obscurité
Émaillée de clochards dont la désespérance
L’invite à s’envoler vers le centre où commence
Un étrange ballet d’inconnus agités.

Porté par le hasard, le solitaire avance
Jusqu’à la gare grise où les trains en partance
Attisent ses regrets d’amant désenchanté.

Sitôt qu’une étrangère habillée d’élégance
S’approche en arborant un regard velouté,
Il sent le submerger un désir exalté.

Sombre abandon

À quoi bon patienter dans cet appartement,
Pendant que, loin de moi, tu cueilles des baisers
Sur le corps d’inconnus qui cachent savamment
Leur insipidité sous des flots de rosé ?

À quoi bon feuilleter les albums de photos
D’une brûlante union souillée par tes mensonges,
Au matin où les crocs de la jalousie rongent
Mon désir effréné de te revoir bientôt ?

À quoi bon cultiver le jardin de l’espoir,
Quand mon cœur se déchire aux vigoureux chardons
Du chagrin qui m’étreint depuis ton abandon
Inscrit en mots sanglants à même le miroir ?

À quoi bon sursauter lorsque le téléphone
Effrite le silence où germent mes douleurs,
Puisque, la voix brisée, j’éconduis le raseur
Inapte à réprimer ton rire qui résonne ?

À quoi bon sangloter dans la froideur du lit
En songeant aux années de notre connivence,
À l’heure où la pendule accuse ton absence,
Terme d’un unisson éteint dans ton oubli ?

Destins de mollusques

Dans la tendre fraîcheur des laitues, se prélasse
Un escargot dodu qu’observe une limace
En train de traverser un carré de fraisiers.
L’élégante sourit de l’animal grossier,
Obligé de traîner sa pesante coquille,
Tandis que, sans fardeau, lisse comme une anguille,
Elle avance gaiement dans le jardin fleuri.
Fatigué, le rustaud rentre dans son abri,
De sorte que le chat, ignorant sa présence,
Terrasse la moqueuse habillée d’imprudence.

9.7.05

Temps sinistre

Sur le cadran étroit de la montre, s’égrène
La mélodie du temps, que le poids colossal
D’un ennui distillé par les anges du mal
Pulvérise en lambeaux de tristesse lointaine.

De seconde en minute et de jour en semaine,
Les lames acérées du néant terminal
Dessinent le chemin d’un désordre mental
Qu’accentue le tic tac à la froideur obscène.

Le présent se délite en un lacis banal
De regrets balayés par le ressort spiral
Du destin insensible aux obsessions humaines.

L’avenir se déchire aux pointes de métal
Du chronomètre affreux qui, sans répit, entraîne
La conscience au tréfonds d’un océan de peines.

Sombre terroriste

Le terroriste, armé d’une fièvre démente,
Se prépare à jeter une bombe sanglante
Dans un bruyant wagon bondé de travailleurs
Sacrifiés sur l’autel de sa noire ferveur.
Aveuglé par sa foi, le sombre énergumène
S’apprête à déclencher une épouvante obscène
Dans l’antre du métro peuplé d’Occidentaux
Que son engin de mort terrassera bientôt.
D’une main assurée par son âpre croyance,
Il fauchera la vie d’inconnus sans défense.

Brusque colère

Mû par une brusque colère
Née d’un regard lourd de mépris,
Le type cogne sa souris
Qui, sonnée, tombe face à terre.

Devant le nez de sa bergère,
Il fracasse un plat hors de prix,
Mû par une brusque colère
Née d’un regard lourd de mépris.

Tandis que la femme s’affaire
À débarrasser les débris
Avec un sourire contrit,
Le malotru la vitupère,
Mû par une brusque colère.

8.7.05

Fée du firmament

Venue d’une planète en train de s’effriter
Dans une galaxie qu’un froid soleil éclaire,
La fille de l’espace atterrit sur la Terre,
Parmi un chapelet de badauds agités.

La princesse parée d’une étrange beauté
Se promène au hasard des bruyantes artères
D’une ville bondée d’inconnus qui s’affairent
À noyer leur ennui dans la frivolité.

Lorsque la créature empreinte de mystère
Pénètre dans la gare habillée de misère,
Une gerbe d’éclairs enflamme la cité.

Aussitôt que s’éteint le fracas du tonnerre,
La fée entonne un chant habile à envoûter
La foule que surprend la brusque obscurité.

Destin de libertin

Les chants désespérés abusent les candides
À l’esprit envahi de rêves insipides.
Lorsque le libertin, las d’être ballotté
Sur l’océan fougueux des brèves voluptés,
Où son âme avisée entrevoit son naufrage,
Décide d’accoster un paisible rivage,
L’horizon se revêt d’un soleil malicieux,
Zélé à raviver un désir prodigieux
Dans son corps vigoureux, de sorte que, fébrile,
Il reprend son périple aux rencontres fertiles.

Harmonie brisée

Chaque soir,
Figée dans ma souffrance,
Je t’attends en silence.
Sitôt que tu parais,
Je m’empresse,
Mue par un tendre espoir,
D’oser une caresse,
Préambule discret.

(Refrain)
Pendant que, drapée de froideur,
Tu rêves d’un radieux ailleurs,
Je tente d’endiguer mes pleurs.

Dans le lit
Où je m’ennuie sans toi,
Tristement j’entrevois
Parmi tes trahisons
Un abîme.
L’écho de nos conflits,
Que l’orgueil envenime,
Menace ma raison.

Refrain

À quoi bon
Accepter l’inconnu,
Lorsque le fil ténu
De notre union s’effrite ?
Peu m’importe
Tes regards furibonds.
Le flot des jours emporte
Notre harmonie tacite.

Refrain

La pluie martèle les carreaux
D’un refrain sinistre aujourd’hui.
Mon amertume me conduit
À fureter dans ton bureau.


Sur la table
De la salle à manger,
Un billet messager
De ton départ soudain
Me désole.
Seule avec ma douleur,
Je comprends que tu voles
Vers un nouveau bonheur.

Refrain

7.7.05

Futur voluptueux

Pendant que le gazier s’esquinte à turbiner
Dans un bureau cossu pour un coquet salaire,
Sa gonzesse se tire, afin de se soustraire
À la désolation d’un amour confiné.

À l’insu de son homme en train de s’échiner
Sur les comptes abscons d’une banque étrangère,
La souris, hermétique au monde des affaires,
File vers un futur de rires effrénés.

De retour au bercail, le bosseur fourbu flaire
Un lézard qu’il essaie de noyer dans les verres
De whisky, qui concluent son maussade dîner.

Loin de son mec prostré sur son lit solitaire,
La nana met les bouts vers un rivage orné
De vacanciers experts en frissons acharnés.

Avenir obscur

Le temps se dilapide en un lacis obscur
D’obsessions, qu’engloutit le génie du futur
Insensible aux frayeurs des humains qui ne cessent
De brûler dans le feu de l’oubli les richesses
D’un savoir établi dans les siècles passés.
Les esprits orgueilleux s’empressent d’effacer
Les traces d’une histoire aux promesses immenses,
Pour instaurer un monde où leur sombre puissance
Condamne la sagesse à mourir sur l’autel
D’un avenir où règne un désespoir cruel.

Noirceur urbaine

La ville accuse la tristesse
Des zonards qui noient dans l’ivresse
Un indicible désespoir
Poussé dans une adolescence
Parsemée de vaines violences
Jaillies sur le fil du rasoir.

(Refrain)
Vide immense une errance.
Un lacis de sourdes souffrances
Germées dans le béton d’où sort
L’armée des anges de la mort.
L’écho d’un souvenir d’enfance.
Vide immense une errance.
Un monde où s’éteint l’innocence.
Un ouragan à l’horizon.
La joie en sa froide saison
Au royaume de l’insolence.

Aux portes du soir, ils arpentent
Les rues pour semer l’épouvante
Parmi les groupes de flâneurs,
Qui fuient vers leur appartement
Quand résonnent des cris déments
Qui prophétisent le malheur.

Refrain

Les voyous cherchent la bagarre
Dans le jardin où les rembarrent
Des vagabonds à la peau grise,
Avant de filer à moto
Dans un bistrot où leurs couteaux
Effraient les bourgeois en chemise.

Refrain

Grisés par l’alcool, ils harcèlent
De grossièretés des donzelles,
Sous les yeux de clients poltrons
Qui plongent le nez dans leur verre,
Tandis qu’un barman en colère
Brandit le fusil du patron.

Refrain

6.7.05

Destin de pied

Sitôt que le réveil l’arrache à la douceur
De la nuit où, serré contre son frère, il panse
Les plaies de la journée d’un baume de silence,
Il arpente un parquet désolant de raideur.

Après un bref répit dans un bain enchanteur
D’où il ressort paré d’enivrantes fragrances,
Il enfile un chausson dont la laideur offense
Son respectable orgueil de discret séducteur.

Dès qu’un soulier de cuir l’emprisonne, il s’élance
Dans la ville animée pour, malgré ses souffrances,
Conduire à son bureau le vigoureux marcheur.

À la tombée du soir, il martèle en cadence
Le trottoir encombré d’individus porteurs
De riches mocassins qu’il double avec fureur.

Rencontre sensuelle

Au moment attendu d’une tendre rencontre
Dans le parc assombri, l’œil rivé à sa montre
Où le temps paresseux s’étire insolemment,
Le citadin paré d’un sourire charmant
Implore le destin pour que bientôt paraisse
Sous ses yeux bienveillants une accorte princesse.
Insensible aux jurons d’un clochard titubant,
Il se lève d’un bond lorsque, devant son banc,
Se dresse une inconnue dont la beauté suscite
Dans son corps vigoureux un désir explicite.

Dans la froideur de la cellule

Dans la froideur de la cellule
Que rétrécit l’obscurité,
L’homme prie le ciel d’écourter
Sa vie que le meurtre macule.

Tandis que le remords le brûle,
Il tourne à pas désenchantés
Dans la froideur de la cellule
Que rétrécit l’obscurité.

Dans ses insomnies se bousculent
Des souvenirs ensanglantés
Qui s’allient pour le tourmenter,
Si bien que sa raison bascule
Dans la froideur de la cellule.

5.7.05

Princesse chagrine

Dans son riche palais où défilent sans cesse
Des prétendants parés d’un sourire charmeur,
La belle, environnée de myriades de fleurs,
Dissimule en son âme une amère tristesse.

Quand, touché par sa grâce, un soupirant la presse
D’enlever les atours qui voilent sa splendeur,
Elle le congédie pour éclater en pleurs
Inaptes à laver l’obsession qui la blesse.

Devant le froid miroir qui renvoie sa blancheur,
L’altesse désolée condamne la laideur
De ses pieds dont la taille accuse la rudesse.

Aussitôt que le drap étire sa douceur
Sur son corps solitaire, en rêve, la princesse
Chausse des escarpins d’une exquise finesse.

Passions voluptueuses

De Parisienne blonde en étrangère brune,
Mon désir vagabonde au gré de ma fortune,
Dans la ville fleurie d’aguichantes beautés
Que j’invite au pays des frissons indomptés,
Bordé d’un océan d’enivrante tendresse,
Habile à raviver l’ardeur de mes princesses.
Au fil des voluptés que je cueille au hasard,
Je poursuis mon chemin, insensible aux regards
D’inconnus qui, jaloux de ma joie rayonnante,
Lancent sur mes passions des piques insultantes.

Dans les débris de la parole

Dans les débris de la parole,
Constellés de regrets épars,
Les mots s’unissent au hasard
En une étrange farandole.

Le temps s’étire en heures molles
Qui distillent des cauchemars
Dans les débris de la parole,
Constellés de regrets épars.

Les ombres de l’espoir s’envolent
Vers le ciel voilé de brouillard,
Tandis qu’un silencieux cafard
Enserre l’âme qui s’immole
Dans les débris de la parole.

4.7.05

Combat céleste

Au paradis, les saints drapés dans leur splendeur
Unissent leurs talents pour écrire un cantique,
Afin de célébrer le Seigneur magnifique
Qui conduit les croyants vers d’infinis bonheurs.

Le diable, exaspéré par cet air en l’honneur
D’un Dieu indifférent à son fiel maléfique,
Court chez son ennemi, où, vengeur, il s’applique
À brûler l’assemblée des célestes chanteurs.

Tandis que meurt l’écho de la pieuse musique,
Le firmament flamboie sous le feu fantastique
Du maître de l’enfer, écumant de fureur.

À l’horizon rougi par les éclairs cosmiques
Que lance le démon contre le Créateur,
Un ouragan augure un monde de terreur.

Médecin chaleureux

Drapé dans un savoir au parfum de mystère,
Le médecin reçoit les patients qu’il s’affaire
D’apaiser par des mots imprégnés de chaleur.
D’un bienveillant sourire, il endigue les pleurs
D’un gamin que tourmente une forte rougeole,
Avant de rassurer un vieillard que désole
La douleur qui s’acharne à lacérer son corps
De ses lames glacées, prophètes de la mort.
D’un regard débordant de tendresse, il soulage
Un jeune dont l’acné dévore le visage.

Sur la pendule de l’espoir

Sur la pendule de l’espoir,
Les secondes se dilapident
En lambeaux de regrets acides,
Constellés de papillons noirs.

Le temps exécute au rasoir
Le cadre d’un futur morbide.
Sur la pendule de l’espoir,
Les secondes se dilapident.

L’aiguille au brillant d’ostensoir
Poursuit son avancée rapide
Vers un monde où l’ange du vide
Assène des coups de boutoir
Sur la pendule de l’espoir.

3.7.05

Dilemme funeste

Dans la voûte enflammée par un soleil limpide
Qu’attise le démon assoiffé de chaleur,
Se déroule un combat entre le Créateur
Et les forces du mal aux mâchoires avides.

Tandis que Dieu, porté par sa tendresse, guide
Les hommes sur la voie de célestes bonheurs,
En semant des versets qui scellent leur ferveur,
Le diable leur insuffle un désespoir morbide.

Pendant que le Seigneur distille dans les cœurs
Un élixir d’amour parfumé de douceur,
Lucifer leur envoie des envies de suicide.

Tiraillés entre un flot de psaumes rédempteurs
Et un marais ombreux de pensées homicides,
Les esprits, terrifiés, s’abîment dans le vide.

Piètre poète

Le cerveau encombré de rêves sulfureux,
Inaptes à donner un sens à ses jours creux,
La poète privée d’inspiration s’enferre
Dans sa méchanceté de vieille solitaire.
Sitôt qu’elle découvre un ouvrage pétri
De diamants ciselés par un brillant esprit,
Elle sent l’envahir une mauvaise rage,
Si bien qu’elle agonit de railleries sauvages
L’écrivain qui, surpris de son âpre rancœur,
Oppose à sa bêtise un silence moqueur.

Entre sa bouteille et ses clopes

Entre sa bouteille et ses clopes
Qui le revêtent de brouillard,
Le poète vit à l’écart
D’un monde où la haine galope.

Il forge un kaléidoscope
D’écrits fleuris d’espoirs épars,
Entre sa bouteille et ses clopes
Qui le revêtent de brouillard.

Lorsque l’ivresse l’enveloppe
D’une joie qui noie son cafard,
Il compose des vers paillards,
Nés de ses désirs nyctalopes,
Entre sa bouteille et ses clopes.

2.7.05

Pieds rebelles

Figés dans la froideur d’un sonnet composé
Par un maître insensible à leur délicatesse,
Les pieds, serrés en vers d’une égale tristesse,
Rêvent de s’échapper de leur cadre imposé.

Lassés de s’enchaîner dans le modèle usé
Que l’artiste acharné manie avec adresse,
Ils s’enfuient de concert, pour former en vitesse
Sur une page vierge un texte improvisé.

Le poète, à la vue de l’œuvre qui transgresse
Les règles qu’il applique avec passion, s’empresse
De remettre les mots dans un ordre avisé.

Fils d’une prosodie dont les lois les oppressent,
Les vocables vaincus décident d’opposer
À l’écrivain borné un silence rusé.

Virée cosmique

Envolée ce matin vers une lune rouge,
J’aborde par hasard une planète où bouge
Un océan orné de chatoyants diamants
Qui dansent un ballet aux présages charmants.
Un bouquet de nuées verse une bruine orange
Sur le sol constellé de végétaux étranges,
Pendant qu’un vent gorgé d’enivrantes odeurs
Fredonne à mon oreille un hymne de bonheur,
Si bien qu’encouragée par sa tiède caresse,
Je plonge dans les flots où s’éteint ma tristesse.

Avec ses godillots crottés

Avec ses godillots crottés,
Le sergent arpente la plaine
Constellée d’un amas obscène
De cadavres déchiquetés.

Il garde un silence attristé
Devant les dépouilles humaines.
Avec ses godillots crottés,
Le sergent arpente la plaine.

Sitôt qu’il entend sangloter
Un gamin mourant qui se traîne
Sur l’autel hideux de la haine,
Le soldat vole à ses côtés
Avec ses godillots crottés.

1.7.05

Alcool ravageur

Après l’apéritif, offert par un ringard
Désireux d’instaurer une cordiale entente
Avec les vacanciers logés près de sa tente,
Le gazier éméché se finit au pinard.

Au cours du pique-nique, il balance des chtars
À son gosse agité dont les cris le tourmentent,
Avant de corriger d’une gifle cinglante
Sa souris qui s’amuse à draguer un lascar.

Sa gonzesse, excédée par ces scènes violentes,
Attrape le moutard pétrifié d’épouvante,
Pour s’enfuir sous les yeux d’un joggeur rigolard.

Seul avec le clébard, le picoleur, que hante
Le démon de l’angoisse au visage blafard,
Interrompt son destin sur le fil d’un poignard.

Chaussures châtiées

La chaussure, lassée d’endurer le martyre
De balades gâchées par un pied qui transpire,
Trame avec sa frangine inondée de sueur
Une machination pour punir le marcheur.
Quand, revenu d’un tour dans la cité, il laisse
Les croquenots crottés pour passer en vitesse
Des chaussons dont l’étoffe augure le confort,
La paire négligée file sans bruit dehors.
Les souliers se replient au fond d’une poubelle,
Où les dévore un chien à la gueule cruelle.

Dans les profondeurs de l’enfer

Dans les profondeurs de l’enfer,
Qu’illumine un feu satanique,
Le démon survolté fabrique
Des oiseaux aux griffes de fer.

Afin d’écraser l’univers,
Il forme une armée métallique
Dans les profondeurs de l’enfer,
Qu’illumine un feu satanique.

Le diable, fossoyeur expert,
Prépare un assaut fantastique
Contre la Terre qu’il se pique
D’ensevelir en un éclair
Dans les profondeurs de l’enfer.

30.6.05

Famille turbulente

Écrasé de chaleur, le gosse éclate en pleurs,
De sorte que sa mère, une pécore obèse,
Lui tend pour le calmer une glace à la fraise,
Qu’il dévore sous l’œil de son frangin boudeur.

Lassé des braillements de ses gnards chahuteurs,
Le gazier se prépare à filer à l’anglaise,
Quand un camé, pressé de dégoter du pèze,
L’agrippe en brandissant un couteau de chasseur.

Alertés par les cris, surgissent deux balèzes
Qui cognent le voyou dont les sanglots apaisent
Leur appétit sanglant de belliqueux frimeurs.

Le daron, animé d’une rage mauvaise,
Latte le toxico qui hurle de douleur,
Tandis que les gamins applaudissent en chœur.

Prophète du vide

La gribouilleuse, armée d’une plume fiévreuse,
Trompe ses insomnies dans des pages verbeuses
Que, mue par son orgueil, elle envoie prestement
Sur la toile où le fruit de ses égarements
Assomme les lecteurs férus de poésie.
Elle étale des vers lourds d’une fantaisie
Nourrie d’un écheveau de rêves insensés.
Elle oppose aux railleurs des textes hérissés
De piques maquillées de laïus insipides,
Qui lui valent le nom de prophète du vide.

Dans l’échoppe du cordonnier

Dans l’échoppe du cordonnier,
Se déroule une lutte obscure
Entre une élégante chaussure
Et un nauséabond soulier.

La belle rit des traits grossiers
Du godillot à la peau dure.
Dans l’échoppe du cordonnier,
Se déroule une lutte obscure.

Elle encourage un ouvrier
À sortir de la devanture
Le croquenot dont elle endure
L’odeur qui vise à l’asphyxier
Dans l’échoppe du cordonnier.

29.6.05

Inspiration rédemptrice

Inspiration, dissous l’ennui qui m’assombrit
Dans un flot de désirs imprégnés d’innocence,
Pour que ma plume, émue par leurs tendres fragrances,
Orne de vers brillants l’horizon défleuri.

Sème des chapelets de joie dans mon esprit,
Afin que, délivrée de mes noires démences,
Je forme des sonnets empreints d’une espérance
Habile à consoler mon cœur endolori.

Délite les échos de mes sourdes souffrances,
En parsemant de mots le jardin du silence
Souillé des souvenirs de mon âme en débris.

Abîme mon chagrin dans l’océan immense
Du verbe constellé d’écrivains aguerris,
De sorte que je loue l’aube qui me sourit.

Pensées d’un pied

Serré dans un soulier d’un cuir dont la raideur
Attise la vigueur des chocs avant-coureurs
De vilaines rougeurs accompagnées d’ampoules,
Le pied, sur le trottoir, bravement se déroule.
Cependant qu’il slalome entre les excréments,
Il prie pour regagner bientôt l’appartement
Où l’attend un chausson dont la douceur se prête
À d’exquises soirées de paresse douillette,
Que conclut son repli vers la tiédeur du lit
Où la nuit engloutit ses douleurs dans l’oubli.

Poème joyeux

Porté par ses vigoureux pieds
Zélés à briser le silence,
Le poème fringant s’avance
Sur la pureté du papier.

Fleuri de rêves familiers,
Il combat la désespérance,
Porté par ses vigoureux pieds
Zélés à briser le silence.

Composé au creux d’un cahier
Orné de souvenirs d’enfance,
Le texte imprégné d’innocence
Chemine vers les cœurs d’acier,
Porté par ses vigoureux pieds.

28.6.05

Poésie champêtre

Seule avec mon poème au bord de la rivière,
Je me laisse bercer par le chant de bonheur
Des oiseaux du pays, qui survolent en chœur
Le décor habillé de couleurs printanières.

Sur ma page égayée par les tièdes lumières
D’un soleil matinal aux rayons enchanteurs,
J’assemble un chapelet de quatrains en l’honneur
De la campagne où meurt ma peine familière.

Dans le paisible écrin de la nature en fleurs,
J’entrevois un futur dont les accents rieurs
Insufflent à mes vers une joie incendiaire.

Grisée par un bouquet de sauvages senteurs,
Qu’éparpille un zéphyr à l’aile aventurière,
Je pare mon cahier de rêveries princières.

Fragilité de l’être

La conscience, envahie de mots qui s’entrechoquent
Dans un déferlement de délires baroques,
Se déchire en lambeaux de souvenirs froissés,
Que les chevaux du temps s’acharnent à chasser.
Un lacis de regrets délite l’espérance
De l’âme qui s’abîme au fond d’une démence
Barbelée de démons au verbe fossoyeur.
Un serment constellé de rires tendres meurt
Dans un puits de silence empreint d’une tristesse
Qui met le point final aux passions de jeunesse.

Arlequins au visage lisse

Arlequins au visage lisse,
Venez gambader dans mon cœur,
Afin d’effacer mes douleurs
Sous votre gaieté rédemptrice.

Semez des sourires complices
Dans mes nuits noires de frayeur.
Arlequins au visage lisse,
Venez gambader dans mon cœur.

Éteignez les larmes qui glissent
Sur mon drap pesant de froideur,
En chantant un air en l’honneur
De votre pays de délices,
Arlequins au visage lisse.

27.6.05

Frissons estivaux

Sur la plage bondée de radieuses beautés,
Le quidam, surveillé par sa moitié, s’applique
À lui dissimuler ses sourires lubriques,
Afin de s’éviter un laïus irrité.

Pendant que le gamin enfouit des saletés
Au fond des trous creusés par sa pelle en plastique,
Le lascar se farcit un copieux pique-nique
Arrosé d’un pinard aux arômes d’été.

Lorsque l’alcool dissout ses chaînes domestiques,
Le loustic sent monter un désir érotique
Qui lui fait entrevoir d’ardentes voluptés.

Quand sa souris commence à lui lancer des piques,
Le gazier, excédé, décide de calter,
Pour s’offrir des frissons au goût de liberté.

Repas agité

Le vieillard épuisé s’affaisse sur sa chaise,
Pendant que sa moitié harcèle de fadaises
La tante aux yeux rougis par l’abus de whisky.
La cousine polie loue le repas exquis,
Tandis que son mari balance sous la table
Un morceau de gigot, dont l’odeur exécrable
Indispose le chat qui file habilement
Faucher à la cuisine un entremets gourmand.
La maîtresse des lieux houspille la grand-mère
Occupée à laver son dentier dans un verre.

Internaute citadine

Rivée à son ordinateur
De citadine solitaire,
L’internaute essaie de s’extraire
D’un soir étouffant de fadeur.

Dans les mots d’un fictif ailleurs,
Elle éteint sa tristesse amère,
Rivée à son ordinateur
De citadine solitaire.

Le manège de séducteurs
Drapés dans un verbeux mystère
Chasse le chagrin qui l’enserre,
Si bien qu’elle sèche ses pleurs,
Rivée à son ordinateur.

Amour condamné

L’amour porte en lui
Les racines de sa mort.

L’amour porte en lui
Un cocktail d’ennuis
Fleurant le remords.
Le désir conduit
Le cœur dans un puits
D’âpres désaccords.
La facilité endort
La joie que le fil des nuits
Abîme dans un confort
Où prolifèrent sans bruit
Les racines de sa mort.

26.6.05

Errance citadine

Dans la ville glaciale, insensible à mes pleurs,
Je marche sans répit, sous les lueurs chagrines
D’une lune pressée que la nuit se termine
Pour s’éloigner d’un monde habillé de laideur.

Au hasard des trottoirs, je traîne mes douleurs
Qu’attisent les regards de filles qu’illumine
Une gaieté fleurie de promesses mutines
Dont la vivacité me déchire le cœur.

Dans le lacis bruyant des rues où je chemine,
J’observe le ballet de poupées citadines
Au visage embelli d’un sourire charmeur.

Quand l’aurore répand sa lumière opaline
Sur les murs constellés de graffitis vengeurs,
Je fuis dans un sommeil aux rêves rédempteurs.

Guitariste solitaire

Dès que la nuit éteint la rumeur citadine,
L’homme quitte la chambre où son espoir décline,
Pour flâner au hasard, seul avec sa guitare.
Il entonne un couplet sur le quai de la gare,
Sous l’œil indifférent des voyageurs pressés,
Avant d’aller chanter dans le parc hérissé
De tilleuls argentés dont les tendres fragrances
Conduisent ses pensées au pays de l’enfance.
Il cisèle un bouquet d’arpèges aux couleurs
Des échos chatoyants de ses premiers bonheurs.

Dans la froideur de son cercueil

Dans la froideur de son cercueil
Que boudent les rayons solaires,
Le mort rêve de se soustraire
Aux bigots en habit de deuil.

Enseveli en un clin d’œil,
Il gît sous un amas de terre,
Dans la froideur de son cercueil
Que boudent les rayons solaires.

Ravagé de tristesse au seuil
D’un néant aux griffes amères,
Il implore Dieu de lui faire
Un signe parmi les écueils,
Dans la froideur de son cercueil.

Tombé d’un nuage nacré

Tombé d’un nuage nacré,
L’ange malicieux caracole
Dans les rues de la métropole,
Parmi les badauds apeurés.

Loin du paradis azuré,
Il amorce une course folle.
Tombé d’un nuage nacré,
L’ange malicieux caracole.

Il déambule à pas feutrés
Entre le marché et l’école
Peuplée de gamins qui rigolent
Devant Jésus désemparé,
Tombé d’un nuage nacré.

Protocole des sots

Les compliments sont
Le protocole des sots.

Les compliments sont
De douillets chaussons
En peau de pourceau.
Filles et garçons
Jouent à l’unisson
Depuis le berceau.
Embarqués sur un vaisseau
De fantastiques frissons,
Les hommes pleurent à seaux
Pour sceller à leur façon
Le protocole des sots.

25.6.05

Envol joyeux

Coincé entre un lourdaud plongé dans un canard
Et un vieux qui dilue sa frayeur dans son verre,
Le lascar qui se tire en Amérique espère
Qu’à l’arrivée l’attend un avenir peinard.

Loin de l’appartement où son bruyant têtard
Sème un boxon qui fout sa gonzesse en colère,
Il calte en loucedé vers l’admirable terre
Où l’imagination se transforme en dollars.

Ravi de s’échapper des griffes délétères
D’un quotidien sinistre auprès de sa bergère,
Il lance à ses voisins de bienveillants regards.

Quand se pointe une hôtesse à la beauté solaire,
Le loustic audacieux lui arrache un rencard,
Devant les yeux jaloux d’un frimeur en costard.

Salle d’attente médicale

Massés dans la touffeur de la salle d’attente,
Les patients, que les crocs de la douleur tourmentent,
Promènent alentour des regards assombris
Par la sourde frayeur qui leur ronge l’esprit.
Un vieillard racorni harcèle sa voisine
D’insolentes questions sur sa mauvaise mine,
Jusqu’à ce qu’excédée, elle éclate en sanglots.
Une fille efflanquée marmonne, les yeux clos,
Sous l’œil indifférent d’un enfant qui s’affaire
À faucher des bonbons dans le sac de sa mère.

Devant le film en noir et blanc

Devant le film en noir et blanc,
Le vieillard aviné rigole,
Pendant que sa femme somnole
Auprès du clébard pestilent.

L’aïeul arrose de gros-plant
Les prouesses de ses idoles.
Devant le film en noir et blanc,
Le vieillard aviné rigole.

Sitôt que, sous ses yeux brûlants,
S’amorce une poursuite folle
Dans les rues de la métropole,
L’ancêtre trépigne en hurlant
Devant le film en noir et blanc.

Faisons la guerre à la cuisine

Faisons la guerre à la cuisine
À coups de poêle ravageurs,
Au lieu de laver dans les pleurs
Les trahisons qui nous chagrinent.

Écharpons-nous dans la farine
Pour épancher notre rancœur.
Faisons la guerre à la cuisine
À coups de poêle ravageurs.

Lançons-nous d’amères tartines
Saupoudrées de mauvaise humeur,
Jusqu’à ce que notre fureur
Se change en caresses mutines.
Faisons la guerre à la cuisine.

Modération

La modération
N’a pas de sens pour les femmes.

La modération
Change la passion
En potage infâme.
Une décoction
D’imagination
Efface les drames.
Dans la déraison se trame
Une âpre satisfaction,
Inégalable sésame
Dont la lente destruction
N’a pas de sens pour les femmes.

24.6.05

Bar animé

Au comptoir, une pute allume deux zonards
Qui diluent dans l’alcool une vague tristesse,
Pendant que son marlou chourave avec adresse
La montre en or massif d’un bourgeois égrillard.

Dans un coin de la salle, un silencieux vieillard
Sirote son whisky sous l’œil d’une gonzesse
Qu’accompagne un tandem de loustics qui ne cessent
De railler vertement la patronne du bar.

Un solide lascar en manque de tendresse
Harponne une souris dont le clébard s’empresse
De lui planter ses crocs de tueur dans le lard.

Un étranger bourré houspille sa maîtresse
Qui le plaque fissa pour suivre un malabar
Dont le désir visible augure un franc panard.

Parc agité

Un gamin rigolard balance des pétards
Sur le lac où barbote un groupe de canards,
Si bien que ce chambard attire des vigiles
Flanqués d’un chien qu’agite une fureur hostile.
Le gosse épouvanté s’élance vers un banc
D’où le chasse un clochard affublé d’un caban.
L’enfant file au hasard, le molosse à ses trousses,
Jusqu’à ce qu’un loubard accoure à sa rescousse.
D’une lame rapide, il plante l’animal
Qui s’écroule en poussant un râle terminal.

Brillant saxophoniste

Devant le public envoûté
Par le chant de son saxophone,
Le brillant musicien entonne
Un air débordant de gaieté.

Il joue un chorus exalté
Qui jusqu’au firmament résonne,
Devant le public envoûté
Par le chant de son saxophone.

Mû par sa générosité,
Il fleurit le soir monotone
D’une musique qui couronne
Son ardente dextérité,
Devant le public envoûté.

Armé d’une pelle en plastique

Armé d’une pelle en plastique,
Le gamin court de toute part
Parmi des grappes de cossards
Que dore un soleil magnifique.

Il bouscule une vieille bique
Qui lui colle aussitôt un chtar.
Armé d’une pelle en plastique,
Le gamin court de toute part.

Dérangé dans son pique-nique,
Un type imbibé de pinard
Interrompt d’un coup de poignard
Le chahut du gosse hystérique,
Armé d’une pelle en plastique.

Cruche nageuse

Tant va la cruche à l’eau
Qu’elle apprend à nager.

Tant va la cruche à l’eau
Qu’un fougueux cachalot
Venu de l’étranger
S’élance sur les flots
Constellés de halos
Aux reflets orangés
Afin de la manger.
Un requin aspergé
Par le gourmand ballot
Jure de se venger.
La bête hurle en solo
Qu’elle apprend à nager.

23.6.05

Naufrage chimique

De suicide manqué en amant de passage,
La belle citadine oppose à la laideur
D’un quotidien hanté par l’ange du malheur
Un océan poisseux de ténébreux mirages.

L’esprit bouleversé par ses affreux voyages
Aux portes du néant, elle dissout ses peurs
Dans la folie que trame un poison précurseur
D’une errance achevée en funeste naufrage.

Poussée par le chagrin qui lui vrille le cœur,
Elle plonge en solo dans un silence où meurt
L’écho d’une passion riche en frissons sauvages.

Le corps déchiqueté par d’atroces douleurs
Qu’attise le venin qui la prend en otage,
Elle quitte son lit pour un froid sarcophage.

Musique en fête

Musiciens amateurs, sortez vos instruments.
Illuminez les rues de vos refrains charmants,
Émaillés des accords de vibrantes guitares.
Unissez vos talents en joyeuses fanfares
Habiles à chasser de leurs voix de métal
La tristesse semée par les anges du mal.
Menez par votre jeu les badauds à la danse,
Afin que, le regard rayonnant d’espérance,
Ils lavent les chagrins qui pèsent sur leur cœur
Dans un torrent fougueux de rythmes enchanteurs.

Fête de la musique agitée

Exaspéré par le chambard
De la fête de la musique,
Le gazier armé d’une trique
S’apprête à mater les braillards.

Les badauds fuient de toute part
Quand surgit le mec hystérique,
Exaspéré par le chambard
De la fête de la musique.

Lorsque le type furibard
Cogne une souris qui s’applique
À chanter un air exotique,
Débarque un belliqueux loubard,
Exaspéré par le chambard.

Avec sa guitare électrique

Avec sa guitare électrique
Ornée de motifs en couleur,
Le leader du groupe amateur
Cisèle un solo magnifique.

Pour la fête de la musique,
Il distille la bonne humeur
Avec sa guitare électrique
Ornée de motifs en couleur.

Devant les badauds, il s’applique
À jouer les accords majeurs
D’un rock qui sème dans les cœurs
Un bouquet de joie qu’il fabrique
Avec sa guitare électrique.

Je ne viens pas ce soir

Je ne viens pas ce soir
Vaincre ton corps, ô bête.

Je ne viens pas ce soir
Lacérer au rasoir
Ta demeure douillette.
Figée dans le couloir,
J’assiste sans espoir
À ton ignoble fête.
Dès que ta voix de tête
Résonne dans le noir,
Calmement, je m’apprête
À voir le laminoir
Vaincre ton corps, ô bête.

22.6.05

Louve amicale

Dès que la nuit étend son aile de noirceur
Sur les humbles maisons de l’antique village,
L’enfant sent naître en lui une voix qui l’engage
À quitter son foyer pour un magique ailleurs.

Dans la campagne obscure, armé de sa candeur,
Il avance sans bruit, quand monte du bocage
Qu’il s’apprête à franchir un hurlement sauvage
Dont le timbre glacé lui déchire le cœur.

Cependant qu’il s’enfuit parmi les pâturages,
Une louve efflanquée surgit sur son passage,
De sorte qu’il se fige, en proie à la terreur.

Lorsque le carnassier lui lèche le visage,
Le gamin épuisé, conquis par sa douceur,
Plonge dans un sommeil aux rêves enchanteurs.

Soirée galère

Vautré dans son fauteuil, le grand-père s’enfile
Quantité de whiskies sous le regard hostile
De sa moitié pressée de se mettre au plumard.
La maîtresse des lieux houspille le vieillard
Qui riposte en tirant une langue blanchâtre.
Le bâtard pestilent, allongé près de l’âtre,
Dévore la poignée d’un affreux sac à main,
Avant d’aller pisser sur un pot de jasmin.
La gamine épuisée tarabuste son père
Qui ponctue de jurons cette soirée galère.

Boîte à musique

Quand s’ouvre la boîte à musique,
La danseuse entame un ballet
Pour accompagner le couplet
Qui chasse son ennui tragique.

Le port altier, elle s’applique
À former des cercles complets.
Quand s’ouvre la boîte à musique,
La danseuse entame un ballet.

Un soleil aux rais magnifiques
Illumine la peau de lait
De la poupée qui se complaît
Dans une liberté magique,
Quand s’ouvre la boîte à musique.

Dans le panier de linge sale

Dans le panier de linge sale,
Le chat flaire une jupe à fleurs,
Qu’il déchiquette avec ardeur
En lambeaux dont il se régale.

Sur une robe de percale,
Il exerce ses crocs joueurs.
Dans le panier de linge sale,
Le chat flaire une jupe à fleurs.

Le félin espiègle s’installe
Sur une veste de chasseur,
Dont les étonnantes odeurs,
Zélées à l’enivrer, s’exhalent
Dans le panier de linge sale.

Comme un vol de gerfauts

Comme un vol de gerfauts
Hors du charnier natal.

Comme un vol de gerfauts
Autour de l’échafaud,
L’homme en habit de bal
Camoufle ses défauts
Sous des cris triomphaux.
Avant le coup fatal,
Son rire de cristal
Désintègre la faux.
D’un mouvement spiral,
Il lance le chauffe-eau
Hors du charnier natal.

21.6.05

Espoir pastoral

Lassée de la froideur de l’âpre capitale
Où mon cœur se flétrit dans un appartement
Dont le silence accroît mes lancinants tourments,
Je m’exhorte à quitter cette vie infernale.

Dans mon errance au creux de la ville où s’exhale
Une haine nourrie de vils aveuglements,
Je supplie en secret les astres de diamant
De guider mon chemin vers une joie rurale.

Au sein d’une nuit sombre où mes égarements
Me noient dans une foule aux masques de ciment,
Je rêve d’un village aux senteurs estivales.

Sitôt que le soleil s’avance au firmament,
Je me laisse emporter par ses lueurs lustrales
Vers un monde qu’égaie la chanson des cigales.

Poupée de satin

La danseuse enfermée dans la boîte à musique
Prie pour que la délivre une main sympathique.
Aussitôt qu’un enfant entrouvre son écrin,
Monte en remerciement un chatoyant refrain
Dont la belle ponctue avec délicatesse
Les accords en tournant sur son socle en vitesse.
Quand le coffre revêt une brusque noirceur
Assortie d’un silence au parfum de malheur,
La poupée de satin implore la lumière
De l’arracher bientôt aux crocs de la poussière.

Devant les tortues du plan d’eau

Devant les tortues du plan d’eau,
Le coureur file à vive allure,
En pestant contre les chaussures
Qui le font souffrir jusqu’au dos.

Encouragé par les badauds
Qui lézardent dans la nature,
Devant les tortues du plan d’eau,
Le coureur file à vive allure.

Quand il bouscule le landau
Que surveille une dame mûre,
Elle lâche un torrent d’injures
Contre les athlètes lourdauds,
Devant les tortues du plan d’eau.

Avant l’ombre

Avant que l’ombre ne s’avise
D’effacer le dernier tableau
D’un amour qui file à vau-l’eau,
Je fais prestement mes valises.

Avant que l’ombre d’un soupçon
N’éteigne ma soif de tendresse,
Je fuis la demeure où me blesse
La ruine de notre unisson.

Avant que l’ombre d’un remords
Ne vienne désarmer ma rage,
Je m’envole vers le rivage
Du plaisir sous un soleil d’or.

Avant que l’ombre ne délite
L’image d’un bonheur flétri,
Je pars pour un futur fleuri
D’une volupté sans limite.

20.6.05

Médecin poète

Entre un vieillard atteint d’une vilaine angine
Et un gamin souffrant d’un léger souffle au cœur,
Le médecin s’enfuit dans le monde enchanteur
De ses vers constellés d’images libertines.

Tandis qu’un indigent aux remugles d’urine
Lui raconte en détail ses cuisantes douleurs,
Le praticien, qu’anime une étrange ferveur,
Cisèle des quatrains qu’il récite en sourdine.

Insensible au patient qui se déverse en pleurs
Sur sa femme envolée vers un funeste ailleurs,
Il se laisse emporter par sa plume mutine.

Au lieu de compatir au ténébreux malheur
D’un jeune cancéreux dont les forces déclinent,
Il assemble en sonnets les mots qui le fascinent.

Alcool rédempteur

Ma princesse partie pour un funeste ailleurs
Sur les rails d’un poison maquillé en bonheur,
Je dilue les échos de ma tristesse amère
Dans un flot de whisky habile à me soustraire
Aux cuisants souvenirs qui hantent mon esprit.
Seule avec ma folie que l’ivresse nourrit,
J’entonne un chant fiévreux dont les notes s’élancent
En bouquet de désirs au parfum d’espérance.
Tandis que le soleil embrase l’horizon,
La chaleur de l’alcool œuvre à ma guérison.

Fric à pic

À quoi bon trimer pour le SMIC
Chez un employeur qui me braque
Par les incessantes attaques
Dont il me martèle en public ?

À quoi bon allonger mon fric
De jeune cador de l’arnaque
Pour acheter une baraque
De vioque dans un quartier chic ?

À quoi bon suriner le flic
Qui roule des yeux de macaque,
Pendant que je lâche des craques
Afin de couvrir mon trafic ?

Avec mon pognon dans mon sac,
Je me débine en Amérique.

Idiot du village

Derrière ses affreux carreaux,
Sanglote l’idiot du village,
Victime des rires sauvages
De ses compagnons de bistrot.

Pendant le tournoi de tarot,
Il endure un vif persiflage.
Derrière ses affreux carreaux,
Sanglote l’idiot du village.

Il déjeune de maquereaux
Suivis d’un morceau de fromage,
En cachant ses larmes de rage
Nées d’une raillerie de trop
Derrière ses affreux carreaux.

19.6.05

Plaisir poétique

Qu’importe l’abandon de sa princesse habile
À souiller leur passion aux frissons enchanteurs
De trahisons celées dans un torrent de pleurs
Répandus sur l’autel du désir versatile !

Qu’importe la laideur des faubourgs de la ville
Infestée d’une armée de voyous bagarreurs,
Zélés à l’abîmer dans l’antre de la peur,
Quand l’insomnie l’entraîne hors de son domicile !

Qu’importe le complot de collaborateurs
Pressés de saccager son travail en l’honneur
D’une ambition bardée de manigances viles !

Dans ses nuits constellées de poèmes rieurs,
Arrosés d’un whisky aux fragrances subtiles,
Un avenir pétri de bonheur se profile.

Festin de loups

Dès que la nuit étend son aile ténébreuse,
Les loups, aiguillonnés par une faim affreuse,
Sortent de la forêt, pour marcher de concert
Vers le calme village où les mène leur flair.
Ils arpentent sans bruit la commune assombrie,
Avant de déboucher dans une bergerie
Où l’alléchante odeur qu’exhale le cheptel
Aiguise leur instinct de carnassier cruel.
La meute déchaînée s’offre un repas splendide
Que conclut leur départ dans l’aurore livide.

Chêne abandonné

Sous les premiers feux de l’été,
Le chêne noueux se désole,
Pendant que les enfants s’envolent
Vers un jardin de liberté.

Devant le visage enchanté
Du maître au sortir de l’école,
Sous les premiers feux de l’été,
Le chêne noueux se désole.

Dans le silence tourmenté
Par un essaim d’abeilles folles,
Il prie que le vent le console
De son souffle empreint de gaieté,
Sous les premiers feux de l’été.

Devant le corps de son complice

Devant le corps de son complice,
Mort pour un braquage raté
Dans un pavillon argenté,
La fille agonit la police.

Un tandem de flics en service
Entreprend de l’asticoter
Devant le corps de son complice,
Mort pour un braquage raté.

Sous les questions accusatrices
Des condés hargneux, la beauté
Conserve un silence buté,
Cependant que ses larmes glissent
Devant le corps de son complice.

18.6.05

Concert magnifique

Lorsque le guitariste amorce un brillant riff,
Un inconnu vêtu d’un costume de serge
Enlace une souris dont le regard de vierge
Ravive en son esprit les souffrances du Juif.

L’impresario remue sa carcasse de suif
Auprès des musiciens asservis à sa verge,
Pendant que le chanteur allume un dernier cierge
Au démon protecteur de son talent à vif.

Devant la scène, un type à la tremblante lippe
Brandit un poing rageur vers le fougueux Philippe
Qui cisèle à la basse une vague d’effroi.

Le public applaudit quand le batteur l’arrose
D’un solo débridé qu’en magnifique roi,
Il dédie à la fan qui lui lance une rose.

Espoir citadin

Épuisé de pleurer sur ses voluptés mortes,
Il plonge dans la ville où la rumeur emporte
Les échos du chagrin qui lui vrille le cœur.
Il arpente les rues bondées de promeneurs
Au visage égayé par les douces lumières
D’une soirée gorgée de senteurs printanières.
Guidé par le hasard, il entre dans un bar,
Où l’alcool à foison embrume les regards,
Avant de succomber au charme d’une femme
Habile à insuffler de l’espoir à son âme.

Devant le corps de sa maîtresse

Devant le corps de sa maîtresse
Dont le sang souillonne le lit,
L’homme rumine les conflits
Venus à bout de sa tendresse.

Avec une indicible ivresse,
Il sourit, son crime accompli,
Devant le corps de sa maîtresse
Dont le sang souillonne le lit.

Aux deux policiers qui le pressent
De questions d’un ton impoli,
Il montre un visage sali
Des pleurs qu’il verse avec adresse,
Devant le corps de sa maîtresse.

Entretien à l’ANPE

L’agent de l’ANPE sort
D’un tiroir un dossier obscur
Qu’il commente d’un ton abrupt.
Ballottée entre ennui et hargne,
J’observe l’homme aux yeux de mouche,
Figé dans un mépris obtus.
Armé du badge de la secte
Des doctes remplisseurs de cases,
Il m’encourage à suivre un stage
De programmeur informatique
Pour gagner un max de pognon.
Au lieu de lui flanquer des gnons,
Craignant un châtiment drastique,
Je ravale ma colère âcre,
Afin d’accepter avec tact.
Pendant que l’employé prend acte
De ma résolution, je file
Avant de commettre une bourde.
D’un pas prompt, je franchis la lourde
Qui me conduit vers mon plumard.

17.6.05

Passion moribonde

Les amants, embarqués pour l’amère croisière
Des querelles bardées de larmes à foison,
Regardent leur passion sombrer sous l’horizon
Qu’obscurcit un lacis de jurons incendiaires.

Leur unisson fleuri de voluptés princières
Se délite en regrets sous l’acide poison
D’un ennui saupoudré d’habiles trahisons
Que cèlent des regards à la froideur de pierre.

Leur tendresse s’éteint dans la sombre saison
De leur complicité au goût de déraison,
Tandis qu’un fiel haineux pollue leur âme fière.

Un silence glacé compose l’oraison
De leurs fougueux désirs qu’étouffe la poussière
D’un quotidien souillé de pensées rancunières.

Noctambule sombre

Aussitôt que la nuit étend son voile noir,
Il arpente la ville au hasard des trottoirs,
Insensible aux jurons d’une faune vulgaire,
Habile à tourmenter les flâneurs solitaires.
Il traîne sa tristesse et sa veste à carreaux
De riche boulevard en minable bistrot
Où le whisky se mêle au sourire des femmes
Pour adoucir l’écho de ses vains mélodrames.
Quand le soleil émet ses premières lueurs,
Il regagne sa chambre habillée de malheur.

Princesse du persiflage

Au lieu de peaufiner ses vers
Nourris de ses enfantillages,
La princesse du persiflage
Essaime ses propos amers.

Elle extrait de son cœur pervers
Le fiel qui noircit ses messages,
Au lieu de peaufiner ses vers
Nourris de ses enfantillages.

Cachée dans son morne univers
Où se prépare son naufrage,
Elle empoisonne de sa rage
Le Net qu’elle voue à l’enfer,
Au lieu de peaufiner ses vers.

Chardons de l’abandon

Ce soir, ma vue se trouble.
En mon âme redoublent
Les rires persifleurs
De l’ange du malheur.

Dans mon esprit palpite
Une fièvre maudite
Qui brise mon espoir
De ses coups de boutoir.

Sur mon lit de souffrance
Entaché par l’absence,
Je regarde mourir
Les roses du désir.

Une douleur vorace
Ravage ma carcasse,
À l’heure où l’abandon
Essaime ses chardons.

Le temps se dilapide
En délires morbides
Qu’envenime un matin
Au soleil incertain.

16.6.05

Présentateur télé

Sous l’œil d’un politique à la face sanguine,
Pressé de débiter son laïus enjôleur,
Le présentateur lit les lignes du prompteur
D’une voix veloutée par dix ans de routine.

Le cador de l’info, dont la diction fascine
Un nombre grandissant de téléspectateurs,
Anime chaque soir les écrans en couleur
D’un festival de scoops que sa classe illumine.

Le regard imprégné d’une aimable pudeur,
Il révèle au public des chapelets d’horreurs
Accomplies en l’honneur de fumeuses doctrines.

Sitôt qu’il entrevoit un rayon de bonheur
Poindre dans le marais des nouvelles chagrines,
Il l’attise de mots qu’en solo il peaufine.

Chat puni

Coincé entre un gamin dont les cris l’exaspèrent
Et un couple bourgeois rebelle à ses colères,
Le matou, fatigué de son nid citadin,
Rêve de flâneries dans d’odorants jardins.
Sa maussade pâtée de poulet aux légumes
Aiguise son chagrin de félin du bitume,
De sorte qu’un matin, mû par son désespoir,
Il s’enfuit pour errer au hasard des trottoirs.
Aussitôt qu’il essaie de sortir de la ville,
Le chat meurt écrasé par une automobile.

Furieux contre le chat siamois

Furieux contre le chat siamois
Que favorise sa maîtresse,
Le chien en manque de caresses
Sombre dans un noir désarroi.

Il court dans le logis bourgeois
En aboyant avec tristesse,
Furieux contre le chat siamois
Que favorise sa maîtresse.

Quand il renverse un coffre en bois
Bourré de fragiles richesses,
Surgit la femme qui s’empresse
De corriger le maladroit,
Furieux contre le chat siamois.

Armée de son fielleux clavier

Armée de son fielleux clavier,
L’internaute amère se venge
D’inconnus que sa haine étrange
Rassemble pour les humilier.

Avec ses sarcasmes grossiers,
Elle envenime les échanges.
Armée de son fielleux clavier,
L’internaute amère se venge.

Au fil de ses mots orduriers,
Où sa sottise se mélange
Aux jalousies qui la démangent,
Elle sème l’inimitié,
Armée de son fielleux clavier.

15.6.05

Concert d’enfer

Le guitariste joue un fantastique riff
Sous l’œil d’une souris dont la robe de serge
Accentue la candeur de son masque de vierge,
Si bien qu’il se promet de la sauter en juif.

Quand un gaillard bourré vient lui chercher du suif
Au sujet d’un frangin habile de sa verge,
Le bassiste le prie d’aller brûler un cierge
Sur l’autel sulfureux des cœurs saignés à vif.

Debout près de la scène, un zonard fait la lippe
En écoutant chanter le scandaleux Philippe
Dont les crachats haineux attisent son effroi.

Aussitôt qu’un tandem de farfelus arrose
De bière le batteur en costume de roi,
Le musicien farceur tire une langue rose.

Vent voluptueux

Imprégné des parfums de lointains horizons,
Le vent souffle son chant d’espoir au diapason
Des oiseaux empressés de voler sur son aile.
Il pare le décor d’une gaieté nouvelle
En chassant les nuées massées au firmament,
Afin que le soleil essaime ses diamants.
La nature, bercée par ses tièdes caresses,
Exhale des bouquets d’odorantes promesses
Qu’en fringant voyageur, il veille à emporter
Pour fleurir l’avenir d’ardentes voluptés.

Bourg du souvenir

Dressé au milieu de la plaine
Que berce un odorant zéphyr,
Le bourg fleuri de souvenirs
Palpite au son de la fontaine.

Les flâneurs des fins de semaine
Visitent ce nid de plaisir,
Dressé au milieu de la plaine
Que berce un odorant zéphyr.

Le navire du temps emmène
Les hommes vers leur avenir,
Tandis que commence à mourir
Le berceau de leurs joies lointaines,
Dressé au milieu de la plaine.

Devant la porte du parking

Devant la porte du parking,
Se déroule un combat féroce
Entre un mec flanqué d’un molosse
Et un trave orné de piercings.

Quand se pointe un vieux en smoking,
Les deux belligérants le rossent.
Devant la porte du parking,
Se déroule un combat féroce.

Un gosse interrompt son jogging
En raison d’une crampe atroce,
Avant de récolter les bosses
Que sèment les cadors du ring
Devant la porte du parking.

14.6.05

Infirmerie scolaire

Entre des toxicos qui fouillent le placard
Dans le coupable but de piquer des seringues,
Et des cancres férus de simagrées lourdingues,
L’infirmière s’abîme au fond d’un noir cafard.

Un zonard, esquinté par un coup de poignard,
Fulmine en enlevant son pantalon cradingue,
Sous les yeux amusés d’un frimeur dont les fringues
Témoignent son orgueil de gosse de richard.

Avec des cris stridents, débarque à tout berzingue
Un gamin qui vomit de peur sur le burlingue,
Aussitôt qu’un scalpel danse sous son regard.

Une fille efflanquée chourave le morlingue
D’un glandeur qui, sonné par l’abus de pétards,
Soliloque à voix basse au creux d’un cauchemar.

Poésie rédemptrice

Je navigue en solo sur l’océan du verbe,
Dans mes nuits d’insomnie, où ma plume superbe
Cisèle des dizains dont les accents joyeux
Effacent les chagrins qu’un démon pernicieux
Sème dans mon esprit, afin que je m’abîme
Au fond d’une folie encadrée par mes rimes.
Saltimbanque perchée sur le fil du rasoir,
Je grave sur ma page un indomptable espoir.
À l’encre du désir, je fleuris le silence
De vers dont la musique égaie mon existence.

Entre le mensonge et les pleurs

Entre le mensonge et les pleurs
Qui concluent les luttes sauvages,
La passion tourmentée s’engage
Sur un chemin lourd de malheur.

Aux bouquets de baisers rieurs
Succède un chapelet d’orages,
Entre le mensonge et les pleurs,
Qui concluent les luttes sauvages.

Les yeux s’ornent d’une froideur
Qui dilapide les images
D’un unisson dont le naufrage
Se trame sous la joie qui meurt
Entre le mensonge et les pleurs.

Après cinq mois de détention

Après cinq mois de détention
Pour un malheureux reportage,
Les deux populaires otages
Apprennent leur libération.

Un déluge d’acclamations
Accueille leur atterrissage,
Après cinq mois de détention
Pour un malheureux reportage.

Inspirés par l’admiration
Des Français face à leur courage,
Ils écrivent un témoignage
Dégoulinant de prétention,
Après cinq mois de détention.

13.6.05

Dragueur châtié

Pendant que sa souris feuillette un magazine
Aux pages émaillées de conseils de beauté,
L’incurable dragueur essaie de susciter
L’attention d’une fille à la bouche mutine.

Sitôt que sa moitié emmène la gamine
Barboter dans la mer gorgée de saletés,
Le lascar, assoiffé de brèves voluptés,
File baratiner la bandante frangine.

Dès qu’il voit le loustic en train d’asticoter
La nana qui, furax, se prépare à calter,
Un malabar, flanqué d’un pitbull, se radine.

Le cavaleur, qu’effraie le molosse excité
Qui gronde méchamment en troussant les babines,
S’enfuit sous les sifflets des gonzesses voisines.

Étrange tribu

Dans le foyer bourgeois, entre la tarte et le café,
Le grand-père enivré commence à s’esclaffer,
Tandis que sa moitié débite des fadaises,
Avant de s’écrouler bruyamment de sa chaise.
La maîtresse des lieux, qu’agace ce chambard,
Se calme en éclusant un torrent de pinard.
Lorsque le père entonne une chanson cocasse,
La gamine, furieuse, affiche une grimace.
Aux portes de la nuit, les visages fourbus
Augurent le coucher de l’étrange tribu.

Afin d’éveiller sa maîtresse

Afin d’éveiller sa maîtresse
Plongée dans un rêve charmant,
Le chat pousse des miaulements
Ponctués de douces caresses.

Mû par sa confiante tendresse,
Il ronronne adorablement,
Afin d’éveiller sa maîtresse
Plongée dans un rêve charmant.

Le félin affamé, qu’oppresse
Le calme de l’appartement,
Bondit sur un empilement
De verres qu’il brise en vitesse,
Afin d’éveiller sa maîtresse.

À tous vents

Roublard, quitte l’appartement
Où meurt l’écho de tes serments.
Sans tes caresses de menteur,
Émergeront d’ardents bonheurs.

Dégage, frimeur détestable.
Envole-toi vers d’autres fables.
Salaud aux baisers dangereux,
Va combler tes désirs scabreux.

Épanche ailleurs ton fiel infâme,
Né de ton penchant pour les femmes.
Tire un trait sur notre passion
Souillonnée par tes perversions.

12.6.05

Promesses poétiques

À quoi bon affronter les fantômes hostiles
Qui dansent dans mes nuits le ballet de la peur,
Avant d’abandonner ma carcasse en sueur
Aux griffes acérées d’effrayants volatiles ?

À quoi bon arpenter le pavé d’une ville
Dont les rues infestées d’une aigre puanteur
Charrient des inconnus vêtus d’une froideur
Qui délite l’écho de mes rêves fragiles ?

À quoi bon exposer mes cuisantes douleurs
À des femmes zélées à me briser le cœur
De leurs baisers fleuris de traîtrises subtiles ?

Seule avec mon stylo, j’oppose à la noirceur
De ma vie de démence, où la mort se profile,
Un chapelet de vers aux promesses fertiles.

Repos terminal

Dans mes nuits d’insomnie, j’exhorte le néant
À me désintégrer, avant que l’océan
De mes sombres douleurs n’abîme ma carcasse
Dans une déchéance aux rémissions fugaces.
Lassée de supporter le déclin de mon corps,
J’appelle à mon secours les anges de la mort.
Je supplie le démon de répandre ses flammes
Dans le désert d’ennui, où s’étiole mon âme,
Afin que, délivrée de mon effroi mental,
J’aborde à la douceur du repos terminal.

Soleil rebelle

Las de sa course monotone
Dans la céleste immensité,
Le soleil choisit de quitter
La Galaxie qui l’emprisonne.

Une étoile géante donne
Asile à son frère attristé,
Las de sa course monotone
Dans la céleste immensité.

Dans le firmament où rayonnent
Des diamants pétris de gaieté,
Le fuyard finit par heurter
Un astre habillé de carbone,
Las de sa course monotone.

Je suis venue te dire

Je suis venue te dire
Le dégoût que m’inspirent
Tes fallacieux sourires.

Je suis venue te rendre
Tes bouquets de mots tendres,
Pour ne plus les entendre.

Je suis venue crier
Mon amour humilié,
Avant de t’oublier.

Je suis venue conclure
Le chagrin que j’endure
Par une âpre rupture.

Je suis venue te faire
Des adieux lapidaires,
Pour que ma vie s’éclaire.

11.6.05

Cauchemar aérien

Le commandant retors, imbibé de pinard,
S’amuse à présager un colossal orage,
Si bien que, dans l’avion, monte une peur sauvage
Qu’essaie de juguler un steward furibard.

Une hôtesse s’active à calmer un moutard
Dont les cris stridulants affolent l’entourage,
Avant de rabrouer des loustics qui propagent
Une atroce frayeur en lançant des bobards.

Un bourgeois, dont l’effroi déforme le visage,
Harcèle de questions son voisin qui dégage
En écrasant les pieds d’un larmoyant vieillard.

Quand le pilote annonce un proche atterrissage,
Des hurlements de joie fusent de toute part
Dans l’appareil où meurt l’ombre du cauchemar.

Frère de poésie

Mon ami écrivain, parti à l’improviste
Au pays ténébreux où gisent les artistes,
Dans ma nuit solitaire empreinte de chagrin,
Je forme en ta mémoire un flot d’alexandrins,
Que je lance vers toi, aux confins du silence,
Afin que, dans la mort, tu ries de ma démence.
Frère de poésie, ton généreux humour,
Gravé dans mon esprit, apaise mon cœur lourd.
L’ombre de ton talent accompagne ma plume,
Pendant que je t’écris cet hommage posthume.

Au bout du chemin montagnard

Au bout du chemin montagnard,
Se dresse un village tranquille
Que, dès l’aube, des volatiles
Égaient de leur chant babillard.

Des fleurs plantées de toute part
Exhalent leurs senteurs subtiles.
Au bout du chemin montagnard,
Se dresse un village tranquille.

Sur un banc, deux noueux vieillards
Évoquent les années qui filent,
Tandis qu’une fille gracile
Succombe au charme d’un gaillard
Au bout du chemin montagnard.

Quand tu auras mon âge

Quand tu auras mon âge,
Tu noieras tes passions
Dans une reddition
Pétrie d’un ennui sage.

Quand tu auras mon âge,
Tu oublieras tes vers,
Pour plonger dans l’enfer
Des scènes de ménage.

Quand tu auras mon âge,
Tu draperas ton cœur
D’un voile de froideur
Lourd de sombres présages.

Quand tu auras mon âge,
Tu comprendras, gamin,
Qu’au terme du chemin,
Se trame ton naufrage.

Maintenant que j’ai l’âge
De mon père à sa mort,
J’oppose aux coups du sort
Un farouche courage.

10.6.05

Souris délivrée

Coincée entre son mec, un sinistre cossard,
Et sa fille flanquée d’amies envahissantes
Qui gloussent de concert de manière insolente,
La souris s’engloutit dans un âpre cafard.

Cependant que des cris fusent de toute part
Dans l’appart converti en porcherie géante,
Elle sent l’envahir une envie foudroyante
De fuir en loucedé cet infernal chambard.

La gonzesse, excédée, prend fissa la tangente,
Tandis que le loustic mate un film d’épouvante,
Dont il ponctue les morts par des coups de pinard.

La nana, délivrée de sa famille, arpente
La citée animée, jusqu’à ce qu’un lascar
L’emmène folâtrer dans les gogues d’un bar.

Bonheur poétique

Afin que, sur mon toit, rayonne le soleil,
Je compose des vers dans mes nuits sans sommeil,
Que je lance au matin vers l’horizon livide.
Je cueille dans mon cœur des mots qui dilapident
La grisaille d’un jour pétri de cruauté.
Mon poème radieux s’acharne à déliter
Le voile ténébreux où le démon enserre
Mon esprit que les crocs de l’insomnie lacèrent.
La douce volupté de mes alexandrins
Augure un avenir au bonheur souverain.

Lune châtiée

Afin de terrasser la lune
Qui, depuis toujours, l’éconduit,
Le soleil incendie la nuit
De ses lumières importunes.

Mû par une vive rancune,
Il demande au ciel son appui,
Afin de terrasser la lune
Qui, depuis toujours, l’éconduit.

Aussitôt que surgit Neptune,
La belle, épouvantée, s’enfuit,
Si bien que Jupiter construit
Une fusée de lave brune,
Afin de terrasser la lune.

Fringante automobile

Dans la fringante automobile,
Le chauffard accélère à mort,
Si bien qu’il ne voit du décor
Qu’un champ d’asphalte, qui défile.

Mû par son désir imbécile
De battre son propre record,
Dans la fringante automobile,
Le chauffard accélère à mort.

Tandis que sa femme gracile,
Bercée par le moteur, s’endort,
À l’angle d’un chemin retors,
L’ange du malheur se faufile
Dans la fringante automobile.

9.6.05

Avion funeste

Durant l’embarquement, un malotru cradingue
Entonne une rengaine aux accents égrillards,
De sorte qu’un steward au timbre nasillard
Le prie d’aller beugler sa chanson chez les dingues.

Tandis que l’appareil décolle à tout berzingue,
Un gamin effrayé vomit sur le costard
D’un bourgeois qui, furax, déclenche un tel chambard
Qu’une hôtesse surgit du fond de la carlingue.

Le commandant dilue son lancinant cafard
Dans un whisky ambré, sous l’aimable regard
Du jeune copilote, complice de ses bringues.

Soudain, dans le cockpit, débouchent deux lascars
Dont l’équipage essaie de chouraver les flingues,
Cependant que l’avion, vers l’océan, valdingue.

Entre la lune et Jupiter

Entre la lune et Jupiter,
S’élabore un complot étrange
Contre le soleil qui dérange
La quiétude de l’univers.

Les alliés tendent dans les airs
Un filet de lumière orange.
Entre la lune et Jupiter,
S’élabore un complot étrange.

Lorsque, dans leur piège, se perd
Une comète aux cheveux d’ange,
Exaspérée, elle se venge
En dressant un rempart d’éclairs
Entre la lune et Jupiter.

Devant les ciseaux du coiffeur

Devant les ciseaux du coiffeur,
Défile une armée d’anonymes
Qui déballent leur vie intime
Avec une impudique ardeur.

En terminant une couleur,
L’artisan cause de régime.
Entre les ciseaux du coiffeur
Défile une armée d’anonymes.

Une fille au masque boudeur
Raconte son projet de crime,
Avant qu’une femme sublime
Ne verse un déluge de pleurs
Devant les ciseaux du coiffeur.

Je connais un pays

Je connais un pays immense
Où la brise invite à la danse
Des fleurs aux exquises fragrances.

Je connais une île de rêve,
Dont les oiseaux égaient la grève,
Sitôt que le soleil se lève.

Je connais un charmant village
Où la joie des enfants présage
Un futur exempt de nuages.

Je connais un jardin désert
Que borde une voûte outremer,
Habile à submerger l’hiver.

Je connais une demoiselle
Dont les yeux limpides révèlent
Une passion qui m’ensorcelle.

8.6.05

Tapin chagrin

Devant le corps glacé de sa sœur de trottoir,
Surinée par un trave en manque d’héroïne
Dans une rue obscure aux remugles d’urine,
Le tapin sent l’étreindre un cuisant désespoir.

Dans un troquet pourave où les cadors d’un soir
Lui lancent des flopées de railleries mutines,
La souris, inspirée par le whisky, rumine
Une vengeance ourdie sur le fil du rasoir.

La gonzesse revoit la mort de sa copine,
De sorte que, plongée dans ses pensées chagrines,
Elle snobe un dragueur accoudé au comptoir.

Le lascar, qu’une envie de câlins turlupine,
Agrippe la nana qui lâche son mouchoir,
Avant de lui coller un œil au beurre noir.

Démence solitaire

Qu’importe mes nuits de tristesse
Dans la maison froide où m’oppresse
Le silence de ma princesse !

Qu’importe la longueur des jours
Où je végète, le cœur lourd,
Entre la chambre et le séjour !

Qu’importe le réveil obscène
Dont l’imperturbable rengaine
Accuse le temps qui se traîne !

Qu’importe l’horizon immense
Qu’illumine un soleil intense,
Indifférent à ma souffrance !

Dans la démence où je me perds,
J’assemble des bouquets de vers,
Afin d’embellir mon désert.

Abécédaire culinaire

Dans mon abécédaire culinaire, mijotent :
Une aubergine farcie de clémentines
Une banane à la frangipane
Un cassoulet de poulet
Un dindonneau aux pruneaux
Un émincé de crustacés
Un flan au vin blanc
Un gâteau de tourteau
Un homard aux épinards
Une île flottante à la menthe
Une julienne alsacienne
Un kaki riquiqui
Un lapin aux miettes de pain
Une moussaka arrosée de muscat
Un navarin au romarin
Un œuf frit à la graisse de bœuf
Un perdreau sur son lit de poireaux
Une quiche aux pois chiches
Un romsteck garni de fruits secs
Un soufflé acidulé
Un tajine de sardines
Un uru cru
Une ventrèche à l’encre de seiche
Un whisky exquis
Un ximenia flambé au ratafia
Un yak mariné au cognac
Un zeste de fantaisie digeste.

7.6.05

Squelette morose

Sur son socle de bois, le silencieux squelette,
Au chagrin revêtu d’une calme blancheur,
Observe le ballet que les mains du masseur
Dansent sur l’abdomen d’une femme replète.

Figé dans un ennui lourd de regrets, il guette
Une enfant dénudée dont l’extrême maigreur
Prophétise un décès qu’en ange protecteur,
Il essaie d’empêcher par des messes secrètes.

Devant le corps musclé d’un cycliste amateur,
Il sent monter en lui une sourde rancœur,
Si bien qu’il agonit la force des athlètes.

Quand l’aile de la nuit chasse les visiteurs,
Le macabre pantin échafaude en cachette
Un projet d’évasion, qu’au matin il rejette.

Dans le jardin du paradis

Dans le jardin du paradis,
Jésus lézarde avec son Père,
Pendant que descend sur la Terre
Un bataillon d’anges maudits.

Soudain le démon s’enhardit
À lancer un violent tonnerre.
Dans le jardin du paradis,
Jésus lézarde avec son Père.

Devant Saint Pierre abasourdi,
Dieu, que les mortels indiffèrent,
Convie le diable à prendre un verre,
Tandis que le Christ applaudit
Dans le jardin du paradis.

Abécédaire gourmand

Dans mon abécédaire gourmand, mijotent :
Une andouillette aux épices secrètes
Un bourguignon aux petits oignons
Une charlotte aux carottes
Une dorade arrosée de citronnade
Une escalope d’antilope
Un faisan au parmesan
Une galette de crevettes
Un hareng au safran
Une igname saupoudrée de sésame
Un jambon aux bonbons
Un kouglof sain et sauf
Une laitue aux écailles de tortue
Une mayonnaise parfumée à la fraise
Un navarin au romarin
Un onglet nappé de sauce au lait
Une pintade aux grenades
Une quenelle sur son lit de chanterelles
Une ratatouille de grenouilles
Une sole aux girolles
Une tomate farcie de dattes
Un unau aux pruneaux
Un velouté pimenté
Un wapiti rôti
Un xérès express
Un yassa de poulet mariné au pissat
Une zarzuela au chocolat.

6.6.05

Vaillant ascenseur

Perché dans un immeuble encombré de raseurs
Qui boudent l’escalier dégoulinant de crasse,
Je m’use à les servir, sans qu’aucun ne me fasse
Le moindre compliment sur ma calme vigueur.

J’accueille aimablement des gosses chahuteurs
Qui marquent leur mépris en crachant sur ma glace,
Si bien que les bourgeois affichent des grimaces
Assorties de laïus qui me brisent le cœur.

Lorsque, dans mon abri, des amoureux s’embrassent,
J’essaie de prolonger leur délice fugace
En drapant leur trajet d’une exquise lenteur.

De l’aube à la nuit noire, au creux de ma carcasse,
Je reçois quantité d’étonnants visiteurs
Que je mène à bon port en vaillant ascenseur.

Dans la cave du professeur

Dans la cave du professeur,
Sa femme délaissée picole
Le bourgogne dont il raffole,
Afin d’apaiser sa fureur.

Lassée de se répandre en pleurs
Sur le destin qui la désole,
Dans la cave du professeur,
Sa femme délaissée picole.

Grisée par le vin enchanteur,
Elle entame une danse folle,
Ponctuée d’étranges paroles
Pétries de sa joyeuse humeur,
Dans la cave du professeur.

Abécédaire médical

Dans mon abécédaire médical, grouillent :
Un anthrax sur le thorax
Une broche qui se décroche
Une céphalée endiablée
Une dysenterie pourrie
Une entorse retorse
Une fistule majuscule
Une gangrène obscène
Une hémorroïde perfide
Un impétigo qui bourgeonne à gogo
Une jaunisse dévastatrice
Une kératite subite
Un lumbago saligaud
Un mélanome polychrome
Une névralgie d’anthologie
Une ostéite qui s’excite
Une peste funeste
Une quarantaine à la traîne
Une rougeole qui caracole
Une sciatique maléfique
Une tumeur de malheur
Un ulcère en colère
Une varicelle rebelle
Un wagon de bubons
Une xanthopsie en dents de scie
Un yagé pour voyager
Un zona aux crocs de piranha.

5.6.05

Clochards citadins

Sous un ciel constellé de nuages labiles,
Un groupe de clochards habillés de malheur
Acclame l’arrivée d’individus porteurs
De cartons débordants de promesses fertiles.

À l’heure du repas devant l’hôtel de ville,
Les vagabonds transis étouffent leur pudeur,
Pour dévorer des mets dont les douces senteurs
Apaisent le chagrin de leur âme fragile.

Les indigents repus remercient leurs sauveurs,
Avant de regagner leur désert de froideur,
Où l’ange silencieux de la mort se profile.

Quand la faim les taraude, ils trompent leur douleur
Avec des rêveries sur des festins habiles
À remettre d’aplomb leur carcasse fébrile.

Cendres des voluptés

Dans les cendres des voluptés,
Palpite une tristesse amère
Dont les remugles délétères
Étouffent le cœur exalté.

La griffe du chagrin s’affaire
À lacérer l’être indompté.
Dans les cendres des voluptés,
Palpite une tristesse amère.

La nuit s’acharne à déliter
L’espérance du solitaire
En lambeaux de regrets, qu’enterrent
Les anges de l’obscurité
Dans les cendres des voluptés.

Devant le gosse emmailloté

Devant le gosse emmailloté
Que lui présente sa bergère,
Le gazier s’efforce de faire
Un sourire empreint de fierté.

Il s’évertue à débiter
Le couplet du père exemplaire
Devant le gosse emmailloté
Que lui présente sa bergère.

Il s’acharne à féliciter
Sa femme épuisée qui s’affaire
À chasser d’une voix sévère
Le quidam goguenard, planté
Devant le gosse emmailloté.

4.6.05

Tapin délivré

La carcasse vrillée par d’horribles souffrances,
Le tapin met les bouts dans le petit matin,
Avant que son barbeau ne dépêche un crétin
Chargé de lui coller une furieuse danse.

Parmi les citadins drapés d’indifférence,
La gonzesse cavale en serrant son butin,
Amassé sur le dos de bourgeois libertins
Qui claquent leur pognon pour de brèves jouissances.

Dans la ville où grandit le murmure indistinct
Des travailleurs unis dans leur morne destin,
Elle court en solo vers sa nouvelle chance.

Sitôt qu’un carillon sonne dans le lointain
Un hymne cristallin, empreint de bienveillance,
La souris lance au ciel un cri de délivrance.

Colère sanguinaire

Sous le regard de sa bergère
Qui grignote un biscuit au lait,
Le quidam sort un pistolet
D’un coffre hérité de son père.

Il tire sur le lampadaire
Dont l’inclinaison lui déplaît,
Sous le regard de sa bergère
Qui grignote un biscuit au lait.

Il abat la pendule en verre,
Pour exterminer son reflet,
Avant de flinguer le poulet
Dont les menaces l’exaspèrent,
Sous le regard de sa bergère.

Galerie alphabétique

Dans ma galerie alphabétique, se prélassent :
Un atrabilaire solitaire
Un bavard ringard
Un cabotin libertin
Un dragueur frimeur
Un égocentrique colérique
Un farfelu dissolu
Un gourmant charmant
Un hystérique pathétique
Un imbécile cinéphile
Un jouisseur enjôleur
Un kamikaze vraiment naze
Un loufoque qui soliloque
Un mythomane mélomane
Un narcisse qui me hérisse
Un octogénaire empreint de mystère
Un pacifiste guitariste
Un querelleur allergique aux fleurs
Un rebelle infidèle
Un sadomasochiste pessimiste
Un ténébreux amoureux
Un utopiste qui m’attriste
Un vantard égrillard
Un wagnérien parisien
Un xénophobe qui me snobe
Un yuppie aux mœurs impies
Un zoophile versatile.

3.6.05

Destin de tapin

Épuisée d’encaisser les volées de son mac,
Un venimeux cador du surin, qui lui pique
Son pèze pour s’offrir des bijoux mécaniques,
La pute toxico se jette dans un lac.

Un quidam baraqué la repêche en kayak,
Avant de l’emmener dans son loft magnifique
Où le manque cuisant de substances chimiques
Engloutit son esprit dans les affres du trac.

Dans la nuit, la souris, rongée par la panique,
Tremble de tout son corps, jusqu’à ce que rapplique
Son dealer qui lui file une dose de crack.

La gonzesse, à l’insu de son marlou, repique
Au trafic de la chair, en rêvant qu’un fric-frac
Mette le point final à ce poisseux micmac.

Dans le bol de café au lait

Dans le bol de café au lait,
Flotte un bout de tarte aux cerises,
Que la femme, aussitôt assise,
Dévore en tachant son gilet.

Sur la bouilloire, son reflet
La déforme avec gourmandise.
Dans le bol de café au lait,
Flotte un bout de tarte aux cerises.

Devant le placard à balais,
Le chat lèche sa robe grise,
Avant de sauter par surprise,
En deux bonds de son corps replet,
Dans le bol de café au lait.

À l’issue du référendum

À l’issue du référendum,
Les partisans du non se marrent,
Sans comprendre que se prépare
Un épouvantable barnum.

Ils crient leur joie ad libitum,
Avant que le fric ne se barre.
À l’issue du référendum,
Les partisans du non se marrent.

À l’orée d’un souk maximum,
Ils louent la France qui s’égare
Sur la voie d’un recul barbare,
Avec sa ruine en post-scriptum,
À l’issue du référendum.